Les impacts du réchauffement climatique sur l’agriculture, la santé, les ressources en eau potable et la biodiversité sont bien réels et chiffrables [highslide](1;1;;;)Voir le 4ème rapport du GIEC [Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat] sur les impacts du réchauffement climatique sur les pays en voie de développement.[/highslide] : sécheresse, inondations, augmentation du niveau des mers, vagues de froid ou de chaleur, ouragans et typhons, récoltes moins abondantes,…. Ils sont malheureusement plus prononcés pour les pays en voie de développement, les moins responsables de ces impacts [highslide](2;2;;;)75% des émissions de gaz à effet de serre accumulés dans l atmosphère viennent des pays développés[/highslide] . Pour Oxfam-Magasins du monde et après la mobilisation des ONG au sommet de Copenhague en décembre 2009, il y a urgence à continuer à se mobiliser pour atténuer, réduire, voire inverser les tendances.
Le sommet de Copenhague, qui s’est déroulé dans un contexte peu transparent, n’a en effet pas abouti à un accord juridique précis, clair et contraignant. Ce sommet a mis en évidence que les pays pauvres et les pays riches ont des agendas différents et que les pays pauvres ne vont pas accepter les conditions imposées par les pays riches. Les discussions vont donc continuer, en vue du sommet de Cancun (Mexique) en décembre 2010, avec des étapes intermédiaires comme à Cochabamba, en avril ou Bonn, en juin.
Voyons comment un partenaire d’Oxfam-Magasins du monde dans le Sud s’engage sur la question des changements climatiques, et comment des organisations comme Oxfam au Nord agissent sur cette question au niveau international, national et régional ?
Nous avons rencontré Brigitte Gloire, spécialiste en développement durable et changements climatiques chez Oxfam-Solidarité et SC.Mittal, directeur de l’association partenaire Pushpanjali (Inde).
Pushpanjali (Inde) et changements climatiques
Pushpanjali est un groupement de producteurs d’artisanat situé à Agra dans le district d’Uttar Pradesh. Il permet à de nombreux producteurs d’améliorer leurs conditions de vie et de bien-être, et lutte pour plus de justice dans le commerce mondial . Comment intègrent-ils dans cette mission principale les changements climatiques et leurs conséquences ?
En Inde, 75 associations font du commerce équitable. Parmi celles-ci, 22 ont dans leur préoccupation la protection de l’environnement. C’est le cas de Pushpanjali, pour qui la prise en compte de l’environnement fait partie de leurs priorités. Selon cette organisation indienne, le développement économique n’empêche pas d’avoir une attention à l’environnement. Au contraire, la destruction de l’environnement peut anéantir les efforts de développement.
Les femmes et les pauvres, premières victimes du réchauffement climatique.
La conscience est grande chez Pushpanjali, que tous les citoyens non seulement d’Inde mais du monde entier sont concernés par la problématique climat, mais certains sont touchés à des degrés différents. Ainsi, en Inde, les changements climatiques touchent particulièrement les femmes et les plus pauvres, car c’est sur elles que repose la responsabilité des familles. Des sécheresses plus fréquentes vont, par exemple, alourdir leurs tâches quotidiennes pour aller chercher de l’eau. Elles devront parcourir plus de kilomètres. Les sécheresses vont réduire les récoltes, ce qui leur procurera moins de revenus. Certaines devront vendre leur maison.
Agir par l’éducation à l’environnement
Pour ce groupement de producteurs, il ne s’agit pas seulement de dénoncer ou protester mais de s’engager concrètement dans la lutte contre les changements climatiques afin d’inscrire des changements de comportement dans la durée.
Cette organisation développe différents projets pour leur permettre d’atteindre des objectifs de sensibilisation et d’éducation à l’environnement, tant auprès de leur public de producteurs et de leur famille, qu’auprès de la population avoisinante ou de touristes visitant des lieux mondialement connus.
La promotion de produits respectueux de l’environnement est déjà un moyen de sensibiliser la population et les clients. Des pratiques et des modes de gestion durables dans leur production et leur emballage permettent également de mettre en pratique leur préoccupation de l’environnement. Pushpanjali met en place des actions concrètes auprès des producteurs pour les encourager à une utilisation rationnelle de l’énergie, de l’eau, du papier, utilisation du vélo,…
L’organisation développe des programmes de sensibilisation à destination d’un public plus large (volontaires dans les écoles, distribution de dépliants dans des lieux très touristiques comme le Taj Mahal, Red fort, …). Ils mettent en place, avec des jeunes, des activités et manifestations (courses pour le climat avec bannières, posters, T-shirt imprimés de slogans, plantations d’arbres, …).
La sensibilisation passe aussi par l’organisation de séminaires pour expliquer les impacts des changements climatiques, avec conseils à l’appui, auxquels sont invités les représentants politiques locaux. Les médias locaux sont informés de toutes ces actions.
Enfin, Pushpanjali est actif également sur le plaidoyer en faveur de l’environnement et l’interpellation des élus locaux (lors de la semaine du commerce équitable par exemple).
Oxfam-en-Belgique et changements climatiques
Oxfam, en tant qu’ONG de développement et de solidarité Nord-Sud, s’intéresse aux changements climatiques et se mobilise. Pour Oxfam, le réchauffement climatique est, avec d’autres facteurs, le stigmate d’un modèle de développement non soutenable, incohérent et particulièrement injuste pour les pays en voie de développement. Précisément quelles sont ces injustices ?
Les pays en voie de développement, doublement victimes du réchauffement climatique [highslide](3;3;;;)Présentation par Brigitte Gloire d Oxfam-Solidarité, lors des soirées d’analyse politique organisées par Oxfam-Magasins du monde les 4, 5 et 6 mai 2010[/highslide]
Ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques (jusqu’à présent les moins pollueurs) qui sont les plus touchés. Pour Oxfam, l’augmentation de la croissance depuis 10 ans ne se traduit plus en une augmentation du bien-être. La richesse doit être mieux redistribuée. Or les pays en voie de développement tirent leurs revenus des écosystèmes fortement menacés par le réchauffement climatique. L’exploitation des ressources naturelles, et en particulier l’agriculture, représente la principale source de revenus pour la majorité de la population des pays en voie de développement. Le secteur agricole représente par exemple 40 % du PNB pour l’Afrique et 70 % des emplois.
Or, les pays en voie de développement ne disposent pas des capacités financières leur permettant de s’adapter aux conséquences déjà perceptibles des changements climatiques.
Les modèles de consommation dans les pays développés diminuent les capacités des pays en voie de développement à se développer et à répondre aux changements climatiques (disparition des forêts naturelles, érosion des sols et des réserves en eau, perte de biodiversité au profit de cultures d’exportation, agrocarburants, etc…).
Les accords de Kyoto, une vraie catastrophe pour les pays en voie de développement
Les mécanismes flexibles prévus dans le protocole de Kyoto n’incitent pas les pays développés à assumer leurs responsabilités, ne bénéficient pas aux pays en voie de développement et octroient des droits de propriété sur un bien mondial (atmosphère). Le protocole de Kyoto [highslide](4;4;;;)Le protocole de Kyoto, entré en vigueur en 2005, vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre[/highslide] permet le système de compensation et le droit d’acheter des « crédits d’émission – droits de pollution » aux pays en voie de développement, sans nécessairement réduire la pollution à la source dans les pays riches !
Oxfam, un mouvement qui bouge aussi pour le climat
Suite à l’échec des négociations de Copenhague, Oxfam continue de se mobiliser et de réclamer un accord international sur le climat qui soit juste, ambitieux et contraignant [highslide](5;5;;;)Le prochain accord sera discuté à Cancun [Mexique], en décembre 2010[/highslide] et qui prenne mieux en compte les intérêts des pays en voie de développement.
Oxfam plaide pour un modèle de développement à faible émission de CO2 et pour une réduction d’au moins 40% des gaz à effet de serre à l’horizon 2020. Ces réductions doivent être majoritairement opérées chez nous (au moins pour 75%). C’est ce qu’on nomme les mesures d’atténuation.
Oxfam demande également des « financements climats » pour les pays en voie de développement qui soient garantis dans le cadre d’un accord international pour soutenir les populations les plus touchées par les changements climatiques (actuellement 250 Mi. de personnes sont concernées, en 2010, elles seront 375 Mi). Ce sont les mesures d’adaptation. Les Gouvernements des pays en développement sont “redevables “ et doivent orienter les fonds climat en fonction des attentes et besoins des populations les plus vulnérables par des plans d’actions nationaux d’adaptation (PANAs). Mais ces financements ne doivent pas être imputés aux 0,7% du budget de la coopération au développement, ils doivent être additionnels. Il doit s’agir de nouveaux mécanismes de financement publics (application du principe pollueur-payeur, taxe carbone sur les avions, taxe Robin des Bois sur les transactions financières,….).
A côté des réponses individuelles, il reste également important d’agir sur le pouvoir des multinationales qui s’emparent des terres au détriment de cultures locales, dénoncer l’absurdité des agro carburants, ….
La mobilisation des citoyens à Copenhague n’a pas infléchi les positions de pays comme les USA et la Chine. Elle demeure donc encore indispensable pour faire pression sur nos gouvernements. La campagne sur les changements climatiques d’Oxfam poursuit son combat pour demander de légiférer au niveau international sur un accord contraignant et pour créer un organisme mondial de l’environnement.
En Belgique, la Coalition Climat, dont Oxfam-Magasins du monde fait partie, appelle les partis politiques à accorder plus d’importance à la problématique du climat. [highslide](6;6;;;)Bruxelles, appel le 4 juin 2010 aux partis politiques belges[/highslide]
Promouvoir un nouveau modèle de développement, qui allie intérêts des populations du Sud, commerce et environnement, telle est la revendication d’Oxfam-Magasins du monde.
L’urgence est là, les changements climatiques exigent des réactions fortes. Aussi bien Pushpanjali en Inde qu’Oxfam partout dans le monde (et en Belgique) essaient de conscientiser les décideurs et les citoyens à une meilleure prise en compte des premières victimes, c’est-à-dire les populations des pays du Sud.
Annick Deswijsen & Véronique Porot
Service Mobilisation