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Oxfam-Magasins du monde

6 portraits de femmes qui risquent leur vie pour notre planète et nos droits

2023 Analyses
6 portraits de femmes qui risquent leur vie pour notre planète et nos droits

Lorsqu’on parle d’impunité des multinationales, on parle souvent de violation de droits humains et de l’environnement. Que ce cache-t-il derrière ces termes généraux ? Beaucoup de choses : destruction de la biodiversité, pollution des eaux, de l’air, maltraitance, violences sexistes et sexuelles, non-respect du code de travail, fraude, corruption, chantage, licenciements abusifs, assassinats… la liste est longue. Surtout QUI se cache derrière ces révélations d’abus ? Des personnes, souvent employé∙e∙s de ces grandes entreprises ou parfois des citoyen∙ne∙s lambda, impacté∙e∙s par ces destructions (sous couvert de « progrès », de« développement »,d’ « accroissement d’activité » selon ces multinationales). Dans le langage commun on se réfère à ces personnes comme des défenseurs∙euses de droits ou lanceurs et lanceuses d’alerte.

Parmi les plus connu∙e∙s, Julien Assange (WikiLeaks), Edward Snowden (CIA), Chelsea Manning (War-Logs de l’armée américaine – Wiki Leaks), Frances Haugen (Facebook), Stéphanie Gibaud (affaire UBS d’évasion fiscale), Antoine Deltour (LuxLeaks), Denis Robert (Clearstream), Erin Brockovich (affaire de pollution des eaux à Hinkley en Californie)…

A l’occasion de la journée internationale des droits des femmes (le 8 mars), cette analyse propose de plonger dans le combat des défenseuses des droits qui se battent et risquent leur vie pour protéger notre planète des exactions des entreprises. Nous vous présentons quelques cas concrets d’affaires (en cours et passées) conduites par des femmes courageuses et valeureuses en Amérique du Sud et en Europe, ainsi qu’un état des lieux de la protection de ces défenseuses des droits. L’occasion également de rappeler qu’une loi sur le devoir de vigilance des entreprises est ESSENTIELLE pour les rendre légalement responsables de leurs actions. Les multinationales tuent, les multinationales détruisent, et il est temps que cela cesse.

Les affaires que nous avons choisi de présenter ici sont toutes documentées (livre, film documentaires, podcast etc), afin que vous puissiez également en tant que lectorat, entrer si vous le souhaiter dans le détail de ces affaires.[1]« Documentary Film | The Illusion Of Abundance », consulté le 16 février 2023, https://www.theillusionofabundance.earth/; « Les nouveaux environnementalistes – Du Myanmar à l’Ecosse … Continue reading

Des femmes activistes pour notre planète et pour nos droits

A. Lanceuses d’alertes et défenseuses des droits

La rapporteuse spéciale des Nations Unies définit les défenseuses de droits telles que « des personnes qui, individuellement ou en association avec d’autres, œuvrent à la promotion ou à la protection des droits de l’Homme de manière pacifique. » Selon l’ONU et le rapport soumis au Conseil des Droits de l’Homme en 2019, 1323 défenseurs∙euses des droits humains auraient été tué∙e∙s entre 2015 et 2019, dans 64 pays. En 2021, les chiffres s’élèveraient à 200 personnes (4 par semaine) d’après Global Witness[2]« Decade of Defiance », Global Witness, consulté le 16 février 2023, https://en.campaigns/environmental-activists/decade-defiance/.. Le site Frontline Defenders répertorie également toutes les tentatives d’intimidation, de violence et d’assassinat commises à l’encontre des défenseurs∙euses des droits dans le monde.

Selon le Conseil de l’Europe, une lanceuse d’alerte est une personne qui « fait des signalements ou révèle des informations concernant des menaces ou un préjudice pour l’intérêt général dans le contexte de sa relation de travail, dans le secteur public ou privé ». L’institution définit également l’alerte comme « la révélation d’informations sur des activités qui constituent une menace ou un préjudice pour l’intérêt général. Les personnes lancent une alerte car elles considèrent qu’il doit être mis fin à ces activités ou que des mesures palliatives doivent être prises. Souvent il s’agit simplement d’informer les employeurs des agissements irréguliers dont ils ignorent l’existence et qu’ils s’empressent de corriger. Dans d’autres cas, les lanceurs d’alertes peuvent estimer nécessaire de contacter les organes réglementaires ou de contrôle, ou les autorités de répression compétentes. Parfois les lanceurs d’alerte voudront rendre publiques ces actes répréhensibles, le plus souvent par le biais de l’internet et d’autres médias, ou en contactant des groupes de défense de l’intérêt général ou des parlementaires. »

Le concept de lanceur∙euse d’alerte est donc réservé au domaine de la relation/lieu de travail alors que le concept de défenseur∙euse des droits humains est plus large. Ces deux concepts sont néanmoins similaires puisque les deux agissent dans l’intérêt général. Elles dénoncent des violations de droits humains ou des pratiques illégales pouvant porter atteinte aux droits humains (santé, protection, violences, corruption…), et malheureusement, font face à des mécanismes de représailles communs (harcèlement, licenciement, violences, menaces, chantage, assassinat…).

La différence se joue donc sur le terrain juridique, au cas par cas, selon le secteur d’activité, le domaine est le pays où est lancée l’alerte ou selon où se trouve le∙a défenseuse des droits humains. Il existe par exemple un statut juridique qui protège les lanceurs∙euses d’alerte en Europe. Cependant, la notion de lancement de l’alerte apparait seulement à partir des années 90 dans le langage français. Elle apparait dans les travaux du sociologue Francis Chateauraynaud à la suite des scandales sanitaires de l’époque (vache folle, pesticides, bysphénol, mercure dans les plombages dentaires, OGM…).[3]Chloé Leprince, « D’Einstein aux Panama papers, une brève histoire du mot “lanceur d’alerte” », France Culture, 15 avril 2016, … Continue reading On retrouve la même notion aux Etats-Unis sous le terme « whistle blowers » mais dès la fin du 19e siècle.


La protection du lancement d’alerte

Dans le domaine large et complexe du droit, on retrouve des lois et des protections « complémentaires » quoique paradoxales : par exemple des lois pour protéger le lancement de l’alerte, et des lois pour protéger le secret des affaires. En ce qui concerne la protection des lanceurs et lanceuses d’alerte en Europe du moins, il existait en 2019 22 législations dans l’UE dont des lois sectorielles dans 50 pays (et 60 dans le monde). De plus, 10 pays dans le monde ont une législation avec une protection globale c’est-à-dire applicable à tous les secteurs (Royaume Uni, Afrique du Sud, Corée du Sud, Nouvelle Zélande, France, Irlande par exemple…)[4]« Lanceur d’alerte : délateur ou Saint-Just ? Que dit le droit ? : épisode 3/5 du podcast L’Ere des lanceurs d’alerte », France Culture, consulté le 14 février 2023, … Continue reading. En 2021, la directive européenne sur le lancement d’alerte est entrée en vigueur. Les pays de l’UE doivent donc transposer cette directive dans leur droit national.

Note d’attention cependant, les lois sur la protection du lancement d’alerte ne concernent que les personnes physiques. Une association ne peut pas prétendre à la protection relative au lancement d’alerte. Dans la loi française relative au lancement d’alerte (loi Sapin II, 2016) la loi ne reconnait également pas les journalistes comme lanceurs∙euses d’alerte, puisqu’elle les qualifie de professionnel∙le∙s de l’alerte (il s’agit de leur métier, à contrario d’une personne employée par exemple).


Pour la simplification de cette analyse et pour recentrer sur le sujet qui nous concerne, à savoir des figures féminines de défense des droits et du bien commun face – précisément – aux pratiques illégales et néfastes des entreprises, nous utiliserons ces deux termes sans entrer plus en détails dans les distinctions juridiques et/ou sociologiques. Les exemples de cette analyse ont été choisis en fonction de leur actualité (récents, en cours et/ou résolus), de leur géographie, et de leur sujet en lien avec le devoir de vigilance des entreprises.

B. The illusion of abundance – un documentaire sur les femmes face à l’impunité des multinationales

Dans ce film documentaire l’Illusion de l’abondance, réalisé par Matthieu Lietaert et Erika Gonzalez Ramirez sorti en 2022, trois activistes du Pérou, du Honduras et du Brésil combattent l’impunité des multinationales. Mines, barrages hydroéléctriques, pollution de l’environnement, extraction (ou pillage) des richesses, accaparement des terres, travailleurs∙euses assassiné∙e∙s sur leur lieu de travail… les combats de Máxima, Carolina et Berta sont des exemples criants de David contre Goliath. Le film retrace leur parcours et leur lutte pour la justice face à des élites politiques et économiques corrompues qui brisent la vie de milliers de personnes et qui détruisent l’environnement dans le seul but de faire du profit.

« Máxima est une paysanne indigène péruvienne qui vivait paisiblement dans une petite maison juste à côté de Yanacocha, la deuxième plus grande mine d’or au monde. Elle vit à 4000 mètres d’altitude, presque sans électricité, vivant d’une agriculture familiale. Un jour, la mine Yanacocha veut étendre ses activités. Le projet Conga arrive à Cajamarca mais elle trouve la maison de Maxima sur son chemin… » explique le binôme de réalisateurs du documentaire. Le projet Conga vise à devenir la plus grande exploitation minière du monde avec 3000 hectares de terrain. La mine est exploitée à 50% par la firme américaine Newmont Mining Corporation, et a parmi ses investisseurs… la Banque Mondiale.

En 2011, dans une situation digne d’un film hollywoodien, débarquent les forces de l’ordre chez Máxima Acuña de Chaupe, frappent et violentent mari et enfants, confisquent les bêtes et brulent la maison de Maxima. Máxima refuse de quitter ses terres. « Tu es une puce face à un éléphant qui va t’écraser » lui dit-on[5]« Máxima Acuña de Chaupe, paysanne péruvienne à l’assaut des géants miniers », TV5MONDE, 5 février 2015, … Continue reading. S’en suit un harcèlement et un siège d’une violence inouïe : interdiction de vendre leurs produits dans les villages environnants, impossible de subvenir aux besoins de la famille, impossible pour sa fille de se rendre à l’université, appels et menaces anonymes…

Maxima Acuna © Raúl García Pereira / Amnesty International


Máxima n’en démord pas et porte plainte auprès d’un procureur, l’entreprise porte plainte pour usurpation de terres et obtient la condamnation de la famille de Máxima en 2013 (à payer une amende). Accompagnée par des ONG locales et internationales, Máxima et les communautés locales continuent le combat. Viols, agressions, destructions de biens, harcèlement et isolement sont le quotidien des personnes qui osent se battre contre les exactions de cette multinationale.

« L’objectif est de les épuiser physiquement et mentalement mais aussi de les obliger à utiliser leurs ressources limitées, tout en les faisant passer aux yeux de la population pour des criminels. »[6]« La fin du calvaire pour cette paysanne menacée d’être expulsée », Amnesty France, consulté le 14 février 2023, … Continue reading explique Amnesty International.

En 2016, Máxima Acuña de Chaupe obtient le prix Goldman de l’environnement qui récompense les défenseuses et défenseurs de droits humains. En 2017, elle obtient gain de cause, et la Cours Suprême du Pérou l’acquitte pour « crime d’occupation illégale des terres ».

Lauréate du Prix Goldman un an avant Máxima, Berta Cáceres connait une fin beaucoup plus tragique. Elle est assassinée quelques mois plus tard, le 2 mars 2016, chez elle, au Honduras. Sa fille Bertha reprend son flambeau. Son combat ? Lutter pour la protection de l’environnement et une vie digne pour sa communauté, contre les projets de barrages hydroéléctriques de la société Desarrollos Energéticos SA (DESA). Malheureusement, l’assassinat et les arrestations arbitraires de citoyen∙ne∙s défenseurs∙euses de droits humains et de l’environnement sont monnaies courantes au Honduras. En 6 ans, 109 personnes sont mortes assassinées pour avoir lutté contre différents projets de ce type.[7]Cécile Raimbeau, « Qui a tué Berta Cáceres ? », Le Monde diplomatique, 1 octobre 2016, https://www.monde-diplomatique.fr/2016/10/RAIMBEAU/56454. Les barrages hydroélectriques et les concessions accordées aux acteurs privés en Amérique Latine depuis les dernières décennies posent la question du développement et du « progrès » face aux pertes environnementales et humaines locales et irréversibles. L’éléphant au centre de la pièce restant indéniablement « qui en profite au maximum » ? Réponse : les multinationales et les élites politiques corrompues.

Berta Cáceres Crédit Photo Unep


Là encore, mêmes arguments de défense : la facilitation des échanges économiques, la lutte contre le réchauffement climatique (sous couvert d’extractivisme), la modernité, la « concurrence » et les mêmes techniques d’intimidation des personnes qui ne voient pas les choses du même œil et qui en subissent les conséquences directes : harcèlement, isolement, menaces, destruction de bien, et impunité absolue : l’assassinat.

« Est-il sensé de multiplier les barrages hydroélectriques au nom de la lutte contre le réchauffement climatique sans remettre en cause un modèle de développement hyper consommateur en énergie et destructeur ? », témoigne le président de la Fédération écologiste du Costa Rica, M. Mauricio Álvarez dans un article du Monde Diplomatique. « Son organisation conteste les projections de consommation énergétique officielles qui justifient de nouveaux barrages. Ces évaluations font fi de toute sobriété énergétique et sont calculées sur la base du développement d’une économie minière et extractive à la fois polluante, très consommatrice en électricité et génératrice de conflits socio-territoriaux meurtriers. »[8]Raimbeau.

​Troisième et dernier exemple en Amérique du Sud, celui de Carolina, qui vit au cœur de l’historique région minière de Minas Gerais, au Brésil. Après la rupture du barrage de déchets miniers à Brumadinho en 2019, elle décide de rendre justice aux 272 personnes tuées en quelques minutes. Et le chemin vers la justice est très long. L’ironie ? Cet accident dévastateur aurait pu être évité. Le groupe minier Vale en charge de l’exploitation, savait, et connaissait les irrégularités et les risques. 272 mort∙e∙s et un désastre écologique majeur pour une falsification de document par l’entreprise d’audit allemande, et une « omission » de la réalité, comprendre entre les lignes, l’envie de continuer à faire un maximum de profit sans prendre en compte les risques. Vale n’en est pas à son coup d’essai. L’entreprise était déjà responsable d’une autre rupture de barrage en 2016 (17 mort∙e∙s et de coulées de boues toxiques sur 600 km).

Carolina de Moura – Parlement Européen


Doit-on vraiment faire les comptes des actions engendrées par Vale et consorts (Samarco, BHP Billiton) face au coût de leur inaction, en vie humaine et en dégât environnemental ? Qu’attendent nos politicien∙ne∙s pour agir, pour prévenir, pour réduire ces risques, si nombreux dans autant de secteurs ? Les réparations aux victimes sont-elles au moins données ? Ironie supplémentaire : non, les multinationales tuent, détruisent mais ne remboursent pas, ne réparent pas. A l’heure actuelle, soit 5 ans après le drame, les victimes demandent une réparation à hauteur de 55 milliards de réais (10,2 milliards de dollars). Vale ne devra en verser que 7 milliards de dollars[9]« Brésil: Vale va verser 7 milliards de dollars pour la catastrophe de Brumadinho », RTL Info, 4 février 2021, … Continue reading. Les familles des victimes témoignent de ne pas avoir été invitées aux tables de négociations. Vale ne sera pas affecté économiquement par ce dédommagement. Carolina de Moura porte la voix des 272 victimes de sa région, elle aussi victime de menaces et de harcèlement.

« Être un défenseur est difficile, dangereux et épuisant, mais c’est aussi joyeux. Vous sentez que votre vie n’est pas vaine. Les femmes défenseuses d’Amérique du Sud apportent une perspective féministe à l’exploitation environnementale. » a témoigné Carolina de Moura lors de l’avant-première de The Illusion of Abundance au Parlement Européen.

Au cœur de ces 3 cas de violations de droits humains, des entreprises, et surtout, des entreprises du Nord. Un système de corruption et de copinage bien rodés afin de garantir un maximum d’obstacles pour que les victimes ne puissent obtenir justice. Une absence totale de responsabilité des entreprises avec pourtant une preuve irréfutable de leur implication et de leur responsabilité dans les violations. Un serpent qui se mord la queue. Mais des victimes réelles, des décès, et un environnement détruit derrière elles.

« Nous avons besoin de la solidarité internationale et de la pression des citoyens de l’Union européenne sur leurs propres entreprises, banques et gouvernements, témoigne Bertha la fille de Berta Cáceres. Ma mère n’est pas morte pour rien, sa lutte doit se propager. »[10]Raimbeau, « Qui a tué Berta Cáceres ? »

C. Défenseuse des droits au Kenya : une décennie de combat face à l’empoisonnement au plomb

Phyllis Omido est une défenseuse des droits humains et de l’environnement kenyane, et est également lauréate du Prix Goldman en 2015 (comme Berta Cáceres). A 44 ans, Phyllis Omido sort d’une bataille juridique de plus de 10 ans avec l’entreprise Kenya Metal Refineries responsable de la pollution de l’eau et de l’air suite à la fusion de batteries au plomb. Pollution qui a entrainé des maladies et des empoisonnements multiples au plomb dans la communauté de Owino Uhuru, dont le fils de Phyllis Omido a été victime également.

Pourtant, Phyllis Omido a informé l’entreprise (pour laquelle elle travaillait) et lui a remis un rapport d’analyse d’impact environnemental de ses activités. Réaction face au travail de Phyllis? L’ignorance.

Après la maladie de son fils, Phyllis quitte l’entreprise et commence le combat pour obtenir justice. Elle prévient les autorités, qui lui répondent avec le même dédain misogyne que les autres cas présentés : selon l’autorité nationale de gestion de l’environnement « ce que je disais était fictif et qu’ils étaient prêts à le défendre devant un tribunal »[11]« La femme qui a gagné 12 millions de dollars en luttant contre les saturnismes », BBC News Afrique, 2 août 2020, https://www.bbc.com/afrique/region-53629540.. Nous sommes en 2010, et à partir du début de l’engagement de Phyllis contre son ancien employeur, les mêmes mécanismes d’intimidation démarrent : harcèlement, menaces, violences des forces de l’ordre contre sa communauté, violences physiques, agression par le biais de groupe armé, incarcération arbitraire…

Phyllis Omido © The Goldman Environnemental Prize


Phyllis Omido continue de collecter les preuves de ces empoisonnements au plomb avec l’aide de sa communauté, du pasteur local et des équipes hospitalières. S’en suivent des organisations de manifestations pacifistes, des lettres, une campagne de sensibilisation et de mobilisation, pour enfin atteindre la fermeture de l’usine en 2014. Depuis la fermeture de l’usine, les membres de la commission sénatoriale de la santé du Kenya ont visité le site de l’ancienne usine. Consternés par ce qu’ils ont vu, ils se sont engagés à fournir des tests à tous les membres de la communauté et à nettoyer la contamination[12]« Phyllis Omido – Goldman Environmental Prize », 18 mars 2022, https://www.goldmanprize.org/recipient/phyllis-omido/.. Phyllis Omido continue le combat et sa demande de réparation en menant une action en justice fondée sur le mandat constitutionnel du Kenya (fournir un environnement propre et sûr à ses citoyen∙ne∙s).

En 2020, Phyllis obtient une promesse de versement de réparation d’un montant de 12 millions de dollars. Une victoire douce-amère puisqu’elle témoigne à la BBC « l’argent ne peut même pas compenser » ce que la communauté de 3 000 personnes a vécu. Néanmoins, les fonds peuvent être utilisés pour le traitement et les médicaments[13]« La femme qui a gagné 12 millions de dollars en luttant contre les saturnismes »..

D. Europe : Deux femmes face à des géants de l’alimentaire et de la banque

Dans un cadre plus attribué au concept de « lanceur∙euse d’alerte », Yasmine Motarjemi et Stéphanie Gibaud ont osé dénoncer l’impunité et l’irresponsabilité de leurs employeurs, respectivement Nestlé et la banque UBS.

Yasmine Motarjemi


Yasmine Motarjemi est experte à l’OMS et rejoint Nestlé en 2000 pour devenir directrice de la sécurité alimentaire de la multinationale suisse. Un beau challenge de carrière qui se terminera en plus d’une décennie de combat judiciaire dont le verdict final est (enfin) prononcé en 2022. Au cœur du problème : plusieurs plaintes contre l’entreprise de la part de familles de consommateurs dont les bébés se sont étouffés avec des biscuits Nestlé (2002, puis 2009). Ensuite, Nestlé responsable de la plus grande intoxication alimentaire de l’histoire, où plus de 300 000 bébés sont intoxiqués en Chine avec 13 bébés morts au compteur. Une enquête est menée. Nestlé est contraint de retirer ses produits mais est disculpé.[14]« Yasmine Motarjemi, seule contre Nestlé ». Depuis 2002, Yasmine Motarjemi fait tout pour sonner l’alarme et retirer les produits du marché, en vain. Elle dénonce une culture d’entreprise de la peur, et des mécanismes de promotions de managers complètement irresponsables. « A ce moment-là, les managers se voient encouragés, par un système de bonus, à ne pas retirer les produits du marché même s’ils sont contaminés. Cela incite les managers à prendre des risques.[15]« Yasmine Motarjemi, seule contre Nestlé ».» (témoignage au micro de France Culture). En 2010 peu après l’affaire d’intoxication en Chine, Yasmine se voit licenciée après des années de harcèlement, entrave à ses fonctions, menaces, etc. avec des effets graves sur sa santé, sa carrière et sa vie. Licenciée, elle amène son combat au tribunal, et doit attendre 2022 pour que la justice reconnaisse Nestlé coupable de harcèlement moral et psychologique et de violation du droit du travail Suisse. Néanmoins, l’entreprise reste impunie quant à la sécurité alimentaire défaillante. En 2019 Yasmine Motarjemi reçoit le prix GUE/NGL pour les journalistes, lanceurs∙euses d’alerte et défenseurs∙euses des droits à l’information au Parlement européen en 2019.

Stéphanie Gibaud – Créative Commons


Dans le secteur bancaire, Stéphanie Gibaud permet de mettre au jour un des plus gros mécanisme d’évasion fiscale de la banque UBS (France) vers la Suisse. A ce jour, l’alerte lancée par Stéphanie Gibaud (et d’autres collègues masculins anciens employés d’UBS) a permis au fisc français de récupérer près de 3 milliards d’euros, et de révéler l’implication de plus de 38000 comptes français ouverts en Suisse dans le but de faire échapper 8,4 milliards d’avoir aux impôts français[16]« Comment UBS Suisse a orchestré un vaste système d’évasion fiscale en France », Le Monde.fr, 17 février 2016, … Continue reading. Licenciée elle aussi en 2012, elle doit attendre aussi dix ans pour obtenir justice et au moins, être reconnue juridiquement comme lanceuse d’alerte. Le fisc français la considérant comme un témoin dans un dossier, et la laissant sans protection. Stéphanie Gibaud subira donc des intimidations de toute sorte : cambriolage, lettres d’insulte, rencontres troublantes… Comme Yasmine Motarjemi, Stephanie Gibaud sera blacklistée et sacrifiera sa vie et sa carrière pour avoir osé dénoncer la fraude et l’impunité.

Des femmes sacrifiées sur l’autel de l’impunité des multinationales et du patriarcat

Dans les 6 portraits dressés dans cette analyse, on retrouve pour chacun des cas des violences et des manœuvres d’intimidation similaires, des procédés d’abus de pouvoir et de harcèlement équivalents qui traduisent l’impunité organisée de ces grandes entreprises avec, souvent, la complicité des Etats.

En guise de cerise sur le gâteau, la violence patriarcale et la misogynie. Dans le monde du travail, la violence sexiste sexuelle s’exprime à travers des canaux très connus que la vaste majorité des femmes ont déjà (malheureusement) rencontré sur le lieu de travail : dévalorisation, objectification, mépris, remarques sexistes, harcèlement moral et sexuel etc.

Il est par ailleurs intéressant (mais déplorable) de constater que ces stratégies sont mises en œuvre par les multinationales lorsqu’une femme ose se dresser face à elles pour les mettre face à leurs responsabilités. L’énergie déployée pour faire plier des femmes aux stratégies professionnelles et pacifiques témoignent du refus des multinationales de faire face à leur responsabilité. Les directions et les personnes responsables au sein de ces entreprises (UBS, Nestlé, Vale etc) ont toutes CHOISI de décrédibiliser, d’humilier, de harceler et de violenter ces femmes, leurs familles et leur communauté. Les autorités locales et/ou nationales sont complices de ces comportements.

« On a très peu de chance de succès, on pense que le jugement est verrouillé. Nestlé jouit d’une impunité. Le gouvernement profite des impôts et de l’influence de l’entreprise, les journalistes ont peur de perdre leur poste ou se font censurer. » explique Yasmine Motarmeji.

Lorsqu’on observe les déclarations et témoignages de ces femmes, on peut facilement décrypter les techniques d’intimidation et de décrédibilisation systématique de la parole des femmes. « On me dit que je suis folle et je ne connais rien » témoigne Máxima Acuña de Chaupe. Les mêmes à l’œuvre lorsque la parole se libère (mouvement MeToo par exemple ou autres). On les ignore, on le fait passer pour des menteuses, ou des folles. « Tout est fait à la fois pour discréditer le lanceur d’alerte et pour rendre l’alerte la moins visible possible » écrit Stephanie Gibaud.

On les infantilise et quand elles continuent à se battre, on les harcèle, on les violente, et puis, dans certains cas, on les tue. Soit directement, en commettant un féminicide (comme le cas tragique de Berta Cáceres ou d’autres), ou indirectement en les poussant au suicide.

« Je n’ai survécu que parce que mon voisin est arrivé à ce moment-là. Les phares de sa voiture brillaient à l’endroit où j’avais été frappée et où j’étais tombée par terre, et mon fils criait » raconte Phyllis Omido à propos d’une attaque d’un groupe armé à son domicile en 2011.

Les effets sur les victimes de ces violences sont également similaires, et la volonté de l’entreprise est de détruire des vies pour protéger des intérêts. « La violence psychique que je subis est énorme. Je vis avec des nausées, je ne me sens plus en sécurité ici, j’ai peur. Peur d’être toujours intimidée. C’est la loi du plus fort. » explique Yasmine Motarmeji[17]Les Alerté.e.s, « Yasmine Motarjemi : Face à l’impunité de Nestlé, La Colère d’une Femme Seule », Medium (blog), 13 décembre 2019, … Continue reading.

Comment donc chiffrer la réparation face à la violence subie par ces femmes, leurs familles et leur communauté (sans compter l’environnement détruit, dans le cas des scandales environnementaux) ? Que peut-on faire face à cette impunité qui sévit encore, partout dans le monde, dans tous les secteurs ? Existe-t-il des protections suffisantes pour ces citoyennes et citoyens qui ne se laisseront pas faire ? Et du côté des entreprises, comment mettre un coup d’arrêt à l’impunité ?

Le rôle des entreprises

Dans sa fiche d’information relative aux personnes qui défendent activement les droits humains, la Rapporteuse Spéciale pour les defenseurs∙euses des droits écrit « Les milieux d’affaires peuvent jouer un rôle positif pour certains droits de l’homme, et avoir une incidence néfaste sur d’autres. C’est pourquoi il est essentiel de déterminer de quelle manière les entreprises et d’autres acteurs répondent aux défenseurs des droits de l’homme qui attirent leur attention sur l’impact négatif de leurs activités sur les droits de l’homme. »[18]« Fiche d’information No. 29 : Les défenseurs des droits de l’homme : protéger le droit de défendre les droits de l’homme », OHCHR, consulté le 16 février 2023, … Continue reading

Ce qui tombe plutôt bien, puisque l’opportunité historique de permettre à des personnes et des associations qui combattent l’impunité des multinationales d’obtenir justice et réparation est justement sur la table de nos politiques depuis maintenant 1 an !

Une loi sur le devoir de vigilance serait en effet complémentaire des législations sur la protection des lanceurs et lanceuses d’alerte. Les entreprises devront désormais aller « rechercher la vérité plus profondément et au loin, incitant ceux qui la détiennent à la lui transmettre (lanceurs d’alerte), allant elle-même au plus près de là où il y a un risque (devoir de vigilance, voire obligation de vigilance). »[19]« Appréciation Du Lancement d’alerte et de l’obligation de Vigilance Au Regard de La Compétitivité Internationale, in Frison-Roche, M.-A., Les Buts Monumentaux de La Compliance », Marie-Anne … Continue reading

Le devoir de vigilance oblige les entreprises à « regarder » et « savoir » ce qu’il se passe au bout de leurs filières afin de pouvoir prévenir et agir en conséquence.

Concrètement, ce devoir de vigilance signifie aussi – si la version de la directive européenne est la plus progressiste possible, que les personnes affectées pourront obtenir réparation, par le biais de mécanismes juridiques prévus par la loi. Plus important encore, si cela figure dans le texte, la responsabilité civile des entreprises pourra être engagée dans des cas de destruction de l’environnement ou de non-respect des droits humains.

Dans le cas de la catastrophe du barrage de Brumadinho, un texte de loi progressiste prend tout son sens. Danilo Chammas avocat spécialisé en droits humains et travaillant sur l’affaire, s’est exprimé au Sommet des Matières Premières à Berlin en 2022 : « « Ici, en Europe, nous savons qu’il y a des coupables impliqués dans cette chaîne, et il est très important que les autorités, les citoyens, se préoccupent de ces questions. Il y a des entreprises qui achètent ce minerai, qui l’exportent, qui donnent des certificats environnementaux et des banques qui le financent. Dans le cas de Brumadinho, nous avons l’implication directe du certificateur Tüv Süd, qui a certifié, quelques mois avant la rupture du barrage, la stabilité de la mine. C’est pourquoi nous essayons de tenir l’entreprise pour responsable non seulement au Brésil, mais aussi ici en Allemagne »[20]S. Comunicação, « Sete anos da tragédia de Mariana: uma estrondosa ‘sirene’ que não serviu para prevenir que o mesmo ocorresse, 3 anos depois, em Brumadinho », Legado Brumadinho (blog), 5 … Continue reading.

Dans le devoir de vigilance, les entreprises qui financent, achètent, produisent et/ou revendent devraient pouvoir être en mesure d’être tenues responsables en cas de violations de droits. Trouvez-vous cela normal que des personnes meurent par faute de négligence parce qu’une entreprise a préféré falsifier des documents d’audits plutôt que de faire son travail et assurer la sécurité de ses infrastructures ? Pourtant, c’est ce qui arrive encore (trop) régulièrement partout dans le monde (l’effondrement du Rana Plaza en 2013 en est également un exemple).

Deux actions en justice ont été intentées contre Tüv Süd à Munich – ville du siège de la société de certification – par des cabinets d’avocats brésiliens, représentant des parents de victimes et des personnes touchées par l’effondrement du barrage. Les deux affaires sont en cours d’évaluation par le tribunal allemand.

Conclusion

« Les vies dans nos villes ont été brutalement traversées par l’irresponsabilité de la deuxième plus grande compagnie minière du monde, qui est Vale. Nous vous demandons d’évaluer l’implication des entreprises du Nord et des gouvernements dans toute la chaîne de valeur des matières premières consommées. N’achetez pas et ne financez pas les entreprises qui violent les droits, qui mettent en danger la sécurité de l’eau et qui contribuent à aggraver la crise climatique » Carolina, activiste au Brésil[21]Comunicação..

La journée internationale des droits des femmes est l’occasion de mettre à l’honneur des parcours de vie de femmes qui se battent pour l’intérêt général et qui font avancer les législations au niveau mondial. C’est aussi l’occasion de montrer que ces combats pour la justice, dont les réparations, l’accès à la justice et à la protection devraient être le minimum requis au vu des exactions commises par les multinationales, sont loin d’être gagnés ! En supplément à ces obstacles et aux pratiques de harcèlement bien rodées des Goliath, les femmes subissent la double peine de leur genre. La violence patriarcale est partout, et encore plus lorsqu’on attaque des figures éminentes de pouvoir (économique, politique, culturel). S’il est tristement intéressant d’observer les mécaniques de violence à l’œuvre pour décrédibiliser, humilier et parfois tuer ces femmes qui osent simplement lutter pour une vie digne pour elles et leur communauté. Il est aussi positif de savoir que les lois changent. Pour qu’elles changent dans le bon sens, pour qu’à l’avenir, les futures lanceuses d’alerte et défenseuses des droits n’aient plus à souffrir et à se sacrifier pour l’intérêt général, il est important qu’en tant que citoyennes et citoyens, nous agissions.

Pour agir, s’informer, se renseigner, et choisir : notre consommation, notre train de vie, nos comportements. Se remettre en question, soutenir les personnes qui se battent : signer des pétitions, écouter leurs histoires, leur donner la parole, et surtout diffuser leurs combats. Plus tard, ce sera aux urnes que tout peut changer. La prochaine échéance sera en mai 2023, au Parlement Européen, pour que la directive européenne sur le devoir de vigilance soit à la hauteur des combats de Phyllis, Berta, Carolina, Maxima, Stéphanie, Yasmine et toutes les autres.

BIBLIOGRAPHIE

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Notes[+]