- Dans le commerce conventionnel, la production de biens alimentaires repose souvent sur une forme d’agriculture qui ne respecte ni l’environnement, ni la santé des producteurs (1)
- L’alternative du commerce équitable met au contraire un point d’honneur à respecter l’environnement et la santé des agriculteurs (2)
- L’alternative politique de commerce équitable d’Oxfam-Magasins du monde vise à interpeller les multinationales et les pouvoirs publics pour favoriser une agriculture plus durable sur le plan écologique et sanitaire (3)
1. Le commerce conventionnel
Si la plus grande partie de la production agricole mondiale provient aujourd’hui encore et toujours d’une agriculture paysanne, cette forme d’agriculture est de plus en plus menacée par le développement considérable ici ou là d’une agriculture industrielle. Or contrairement à l’agriculture paysanne, dont les formes les plus traditionnelles sont particulièrement bien adaptées aux besoins spécifiques de chaque écosystème local, l’agriculture industrielle rompt cette symbiose avec le milieu naturel, portant du même coup gravement préjudice à l’environnement et à la santé des producteurs.
Le recours massif aux pesticides chimiques…
Parmi les caractéristiques de l’agriculture industrielle, la plus fondamentale est probablement l’utilisation massive d’intrants externes (Sachs, Santarius, 2007) et en particulier d’intrants chimiques. Cette utilisation domine le quotidien d’un grand nombre d’exploitations agricoles, bouleversant les pratiques paysannes traditionnelles, à des rythmes et des degrés divers selon la région du monde considérée.
…au détriment de la nature…
S’il est parfois difficile d’évaluer avec précision les effets des pesticides sur l’environnement, on sait avec certitude combien ces impacts peuvent être très néfastes. Pollutions de cours d’eau, morts d’insectes non nuisibles aux cultures ou d’animaux font partie des dégâts environnementaux fréquemment observés.
…et de la santé humaine
La santé des agriculteurs et travailleurs agricoles est également touchée. Lorsque ces produits intrinsèquement nocifs sont utilisés sans équipements de protection appropriés ni autres précautions d’usage élémentaires, ou sont stockés dans des conditions de sécurité insuffisantes, leur usage favorise l’apparition de nombreux problèmes de santé. Sont par exemple associés aux pesticides chimiques utilisés dans la culture du coton les problèmes suivants : pertes de poids, faiblesse, maux de tête, tremblements, affections des voies respiratoires, des reins, affections du système nerveux, du foetus en développement, immunodéficience du foie, cancers de la prostate, du sein ou du cerveau. Pour éviter totalement ou presque le recours aux pesticides et intrants de synthèse, l’agriculture biologique et la « lutte intégrée » constituent les modes de culture les plus appropriés (Parmentier, 2006).
Une tendance à la monoculture…
Le recours aux intrants de synthèse coûtant très cher, il nécessite de solides moyens financiers. Cette nécessité induit le souci permanent d’augmenter la rentabilité financière de l’exploitation. Une préoccupation qui débouche notamment sur la recherche constante d’une croissance des rendements à l’hectare. Cette recherche conduit à réduire considérablement le nombre de denrées cultivées, au point de n’en cultiver très fréquemment qu’une seule, le plus souvent en monoculture. Consistant à cultiver une seule denrée (à l’exclusion d’autres plantes) sur un terrain de manière répétée d’une année à l’autre, ce mode de culture favorise en effet théoriquement l’augmentation du rendement (UCS, 2001 ; Sachs, Santarius, 2007). Mais en même temps, la monoculture engendre de sérieux problèmes environnementaux :
- Elle appauvrit les sols en favorisant l’épuisement de certains de leurs éléments nutritifs.
- Elle expose davantage les cultures aux attaques de ravageurs, parasites, maladies, entraînant une utilisation croissante d’intrants synthétiques et des problèmes qu’ils posent…
…et aux OGM
Le développement de l’agriculture industrielle va également de pair avec l’essor aujourd’hui phénoménal des OGM (organismes génétiquement modifiés). Sensés garantir un avenir meilleur aux agriculteurs (hausses de rendement, réduction des quantités d’intrants chimiques utilisées), ces cultures génétiquement modifiées posent concrètement problème à bien des égards. Sur le plan environnemental, l’un des problèmes posés est le risque d’une réduction de la biodiversité, les semences transgéniques étant susceptibles de contaminer les semences naturelles [highslide](1;1;;;)
Pour en savoir plus sur les OGM et les problèmes qu’ils posent sur le plan environnemental, culturel, économique, social ou même judiciaire (en lien avec la problématique des droits de propriété intellectuelle sur le vivant), consulter par exemple le site Internet de l’organisation GRAIN : http://www.grain.org.[/highslide] .
2. L’alternative du commerce équitable
À son échelle, la vente de produits issus du commerce équitable génère un développement durable pour l’environnement et la santé des producteurs.
Des pratiques respectueuses de l’environnement…
Les critères de commerce équitable d’Oxfam-Fairtrade (marque des produits alimentaires de commerce équitable) mettent notamment l’accent sur la protection de l’environnement. Ils requièrent au minimum que «l’organisation de producteurs applique la législation nationale et internationale en ce qui concerne l’emploi et l’usage des pesticides, la protection des cours d’eau naturels, la forêts vierge et les autres écosystèmes à haute valeur écologique, la lutte contre l’érosion et la gestion des déchets » (Oxfam-Wereldwinkels, 2002). En outre, Oxfam-Fairtrade encourage vivement la culture en lutte intégrée [highslide](2;2;;;)
Pour une brève explication de ce qu’est la « lutte intégrée », consulter l’analyse « Commerce équitable et revenus des producteurs ».[/highslide] et l’agriculture biologique. Actuellement, un tiers des produits Oxfam-Fairtrade sont certifiés biologiques (Oxfam-Fairtrade, 2006).
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L’exemple d’ATC aux Philippines, partenaire d’Oxfam-Fairtrade
Depuis 1986, ATC (Alter Trade Corporation) écoule dans le réseau du commerce équitable des produits issus de la culture de la canne à sucre sur l’île de Negros, aux Philippines. Au total, près de 400 paysans livrent leur sucre à l’organisation, basée à Bacolod-City. Provient par exemple de ce partenaire le sucre Mascobado bio vendu dans les Magasins du monde-Oxfam. ATC met en oeuvre un programme d’agriculture écologique. L’organisation fait la promotion de l’agriculture biologique, de la diversification des cultures et des pratiques agricoles écologiques. Aux Philippines comme ailleurs, obtenir la certification bio est financièrement hors de portée d’une grande majorité de paysans cultivant pourtant de manière biologique. Pour leur donner accès à cette certification, ATC les soutient financièrement. En outre, ATC encourage le transfert de connaissances et de méthodes écologiques entre les membres .
Informations reprises du site d’Equiterre : http://www.equiterre.org.
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…et de la santé des producteurs
En privilégiant la réduction maximale (idéalement l’abandon) des engrais et pesticides chimiques, le commerce équitable ne promeut pas seulement un environnement plus sain. Il favorise l’amélioration de la santé des producteurs et travailleurs agricoles (outre celle des consommateurs), ceux-ci étant nettement moins exposés aux effets toxiques de ces dangereuses substances.
La préservation de la biodiversité
Respecter l’environnement implique entre autres de préserver la biodiversité, en ce compris celle des variétés existantes de semences naturelles. C’est l’une des raisons pour lesquelles les produits Oxfam- Fairtrade ne contiennent pas d’OGM (ceux-ci représentant par ailleurs des risques potentiels pour la santé des consommateurs).
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L’exemple de Navdanya en Inde
En 1982, Vandana Shiva, l’une des plus célèbres environnementalistes des pays émergents, disait adieu à sa carrière académique en physique quantique, pour fonder et se consacrer à la RFSTE (Research Foundation for Science, Technology and Ecology), qui finance des projets élaborés dans la perspective d’un développement durable des campagnes indiennes. En 1987, la RFSTE fondait Navdanya. La RFSTE/Nadanya est l’un des partenaires de commerce équitable d’Oxfam-Fairtrade (riz basmati). Navdanya est un réseau étendu d’initiatives permettant de préserver la biodiversité existante et de se défendre contre l’industrie agrochimique. A l’origine, tout est parti d’un projet pilote qui a été mis sur pied sur une superficie de 7 ha seulement : des semences traditionnelles sont réintroduites et des formations sont dispensées aux cultivateurs. Aujourd’hui, Navdanya est à la tête d’un réseau à l’échelle du pays de banques locales et régionales de semences traditionnelles. Les cultivateurs obtiennent les semences gratuitement à deux conditions : soit ils fournissent à la banque une quantité de semences qui correspond au double de ce qu’ils ont reçu, soit ils transmettent à d’autres cultivateurs semences et savoir faire. Un cultivateur peut devenir membre de Navdanya à condition d’utiliser des semences traditionnelles et de n’utiliser que des engrais et des pesticides naturels.
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3. L’alternative politique de commerce équitable d’Oxfam-Magasins du monde
Oxfam-Magasins du monde entend faire davantage que de soutenir concrètement un développement respectueux de l’environnement et de la santé humaine en commercialisant des produits de commerce équitable. L’objectif est également d’interpeller multinationales et pouvoirs publics afin d’engager le commerce conventionnel sur cette même voie.
En 1999, Oxfam-Magasins du monde lançait la campagne « Chiquita, çavapas », campagne très intensive qui s’inscrivait dans le cadre d’une campagne internationale visant à dénoncer les conditions de travail dans les plantations des multinationales du secteur de la banane. La campagne « Chiquita, çavapas » a bien montré, entre autres choses, combien la défense des droits des travailleuses et travailleurs agricoles et la protection de l’environnement peuvent aller de pair. En effet, était notamment dénoncé l’usage intensif et excessif de pesticides dans les plantations, aux graves répercussions non seulement pour l’environnement mais aussi pour la santé humaine. Survolant les plantations, des avions pulvérisaient fréquemment des produits toxiques alors que les ouvriers étaient encore dans les bananeraies. Avec pour conséquences d’importants problèmes sanitaires : cancers de la peau et de l’estomac, affections des voies respiratoires, stérilité, invalidité, malformations chez les nouveau-nés. Les femmes passaient plus de 10 heures par jour, les mains nues plongées dans des réservoirs remplis de produits chimiques utilisés pour nettoyer les bananes avant l’exportation. Les vêtements de protection étaient souvent inexistants ou inadaptés.
Depuis lors, quelques progrès ont été enregistrés sur le plan environnemental, la multinationale bananière ayant notamment signé en 2005 le code de conduite de la RainForest Alliance, un code de conduite assez consistant en matière de protection de l’environnement (nettement moins en matière d’engagements sociaux ou socio-économiques). Ce qui montre que les multinationales peuvent être sensibles à la pression des consommateurs.
Stéphane Parmentier
Références
- Oxfam-Fairtrade. (2007). Rapport annuel 2006. Les paysans du Sud méritent mieux. Oxfam-Fairtrade, 16 p.
- Oxfam-Wereldwinkels. (2002). Collaboration avec nos partenaires. Une approche renouvelée. Oxfam-Wereldwinkels, 24 p.
- Parmentier S. (2006). À la rencontre du coton. Oxfam-Magasins du monde, 26 p.
- Sachs W., Santarius T. (2007). World Trade and the Regeneration of Agriculture. ECOFAIR TRADE DIALOGUE Discussion Papers N°9. Heinrich Böll Foundation, Misereor, Wuppertal Institute for Climate, Environment and Energy, 57 p.
- UCS (Union of Concerned Scientists). (2001). Industrial Agriculture : Features and Policy. [24/10/07]. Disponible <http://www.ucsusa.org/food_and_environment/sustainable_food/industrial-agriculture-features-and-policy.html>