Compte-rendu de l’intervention d’Olivier De Schutter lors de l’Assemblée Générale d’Oxfam-Magasins du monde du 15 décembre 2018
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Olivier De Schutter est un juriste belge et professeur de droit international à l’UCL. Il a été rapporteur spécial pour le droit à l’alimentation à l’ONU entre 2008 et 2014.
La présente analyse est un compte-rendu de son intervention à l’assemblée générale d’Oxfam-Magasins du monde le 15 décembre 2018. La retranscription littérale de l’intervention est disponible sur demande à l’adresse bruno.gemenne@mdmoxfam.be .
Le paradigme de la souveraineté alimentaire
Olivier De Schutter débute son intervention en développant le concept de « souveraineté alimentaire ». Ce paradigme est monté en puissance dans le courant des années 90 soit bien après le commerce équitable qui revendique déjà une cinquantaine d’années d’existence. La souveraineté alimentaire, c’est le droit des populations, de leurs pays ou Unions à définir eux-mêmes leur politique agricole et alimentaire, sans dumping vis-à-vis des pays tiers[1. Définition de la souveraineté alimentaire selon la Via Campesina. https://viacampesina.org/fr/ : visité le 27/12/2018.].
Ce concept est né en 1993 au moment où se négocie à l’OMC[2. OMC = Organisation Mondiale du Commerce] un programme de libre-échange et de mise en concurrence mondiale des produits agricoles. Les petits paysans, craignant de ne plus exister dans ce système, se rassemblent dans la Via Campesina, lors d’une première réunion à Mons, pour défendre la souveraineté alimentaire. La Via Campesina est un réseau international qui rassemble des millions de paysannes et de paysans, de petits et de moyens producteurs, de sans terre, de femmes et de jeunes du monde rural, d’indigènes, de migrants et de travailleurs agricoles. Ses premiers membres étaient issus de l’Amérique latine et de l’Asie du Sud.
Les paysans réalisent que leurs concurrents ne sont pas les autres petits paysans, mais bien le modèle agro-industriel qui est en train de se mettre en place : la souveraineté alimentaire va donc s’opposer aux politiques néo-libérales érigées par l’OMC. Elle constitue une tentative d’affirmer un besoin de contrôler les systèmes alimentaires pour qu’ils ne soient pas otages du commerce international et pour protéger l’agriculture paysanne.
La spécificité du domaine agricole, c’est que la capacité pour les producteurs à s’adapter aux signaux des prix n’est pas la même que pour d’autres domaines (comme l’artisanat, l’électronique, l’automobile). Si on prend l’exemple d’une usine qui tisse du lin ou du coton pour produire des chaussettes et des t-shirts, celle-ci peut facilement passer de l’un à l’autre dans sa production en fonction de l’évolution de la demande et de l’évolution des prix. Dans le milieu agricole, seuls les très gros producteurs peuvent passer d’une culture à l’autre année après année (ex : passer de la culture du maïs à la culture du soja). Pour une large majorité de paysans dans le monde, ce n’est tout simplement pas possible de suivre l’évolution des cours sur les marchés internationaux.
Prenons l’exemple de la culture du café. Les cours du café s’affaissent, mais le petit producteur doit néanmoins continuer à subvenir aux besoins de sa famille (nourriture, soins de santé, éducation, logement). Il n’a pas non plus les moyens financiers et matériels, ni les connaissances nécessaires pour se lancer dans une autre culture. Les facteurs météorologiques et de composition du sol réduisent également les possibilités de changer. Au lieu de réduire sa production de café parce qu’elle n’est pas assez rémunératrice et de passer à autre chose, il va au contraire produire plus de café et tenter de conserver les moyens financiers indispensables à sa survie. Il va ainsi, de manière paradoxale, participer à accélérer la surproduction de café et la baisse des cours. Nous allons donc assister à ce phénomène étrange qui a pour conséquence que l’offre ne va pas baisser quand les prix baissent, mais va au contraire augmenter, accélérant de ce fait la baisse des prix. C’est ce que les économistes appellent le « cycle du cochon » : comme tous les producteurs réagissent aux mêmes signaux, la volatilité des prix est très importante. Les petits agriculteurs qui se sont endettés pour lancer leur production, qui ne peuvent pas survivre à une mauvaise saison ou qui sont tout simplement moins bien outillés pour survivre à cette volatilité des prix, vont être progressivement écartés des marchés sur lesquels ne vont rester que les plus gros producteurs qui ont les reins assez solides pour encaisser les chocs qui y sont liés. Ils sont les grands gagnants de ce type d’économie.
Parce que l’agriculture dépend très étroitement des conditions climatiques et météorologiques, de la qualité des sols, de la connaissance des paysans des filières dans lesquelles ils peuvent écouler leur production, il n’est pas possible de raisonner en matière d’agriculture comme on peut raisonner en matière de textile, de produits manufacturés ou encore d’industrie automobile. Ce que la Via Campesina met en avant depuis les années 90, c’est qu’on ne peut pas soumettre le secteur agricole à la logique des prix et à la libéralisation commerciale. La souveraineté alimentaire est donc un contre-projet à celui qui est porté par l’OMC.
Le grand public et des médias comprennent mal le concept de souveraineté alimentaire. Celle-ci n’est aucunement un refus du commerce, un retour à une autarcie économique et à un repli sur soi. La souveraineté alimentaire défend un commerce équitable et durable qui ne sacrifie pas les petites exploitations familiales et l’agriculture paysanne sur l’autel de la mise en concurrence des producteurs du monde. Si on laisse les forces du marché déterminer qui va gagner et qui va perdre, ce sont forcément les plus grandes exploitations agricoles qui vont s’en sortir : celles qui se mécanisent, celles qui réalisent de grandes économies d’échelle en exploitant de vastes surfaces, celles qui produisent de gros volumes pour les grands transformateurs tels qu’Unilever, Nestlé ou Danone. Laisser le marché dicter sa loi va provoquer la disparition de la petite paysannerie. La souveraineté alimentaire revendique donc que les règles du commerce mondial soient déterminées de manière démocratique et fassent l’objet d’un débat public.
Logique économique Vs logique écologique
Olivier De Schutter nous présente ensuite deux logiques qui s’affrontent dans le commerce international : la logique économique (celle de la mise en concurrence des producteurs du monde) et la logique écologique.
Cette dernière consiste à produire de manière
- à respecter la santé des sols,
- à maintenir une agro-biodiversité,
- à avoir des cultures diversifiées qui ne mènent pas à l’épuisement des sols,
- à utiliser des légumineuses pour fertiliser les sols,
- à réduire l’usage d’engrais azotés,
- à supprimer l’utilisation de pesticides.
Ces principes ont, la plupart du temps, été mis de côté par l’agriculture industrielle au nom de gains d’efficience et d’économie de coûts. Ce qui favorise le développement d’une agriculture non-durable, industrielle, organisée en grandes monocultures.
Etant capable de produire à bas prix pour les acheteurs, l’agriculture industrielle est très compétitive et concurrentielle sur les marchés internationaux. . Mais elle va engendrer des coûts considérables pour l’agriculture paysanne qui est perdante dans ce système, pour les générations à venir et pour les écosystèmes qui vont se détruire. La logique commerciale vient donc écraser la logique écologique : les deux sont, selon Olivier De Schutter, inconciliables. C’est la raison pour laquelle il milite pour l’intégration de préoccupations environnementales dans les règles du commerce international.
Le commerce équitable comme laboratoire
Aujourd’hui, les militant.e.s de la souveraineté alimentaire ont amené dans le débat public la question des limites d’un modèle de mise en concurrence des producteurs dans le monde. Il est nécessaire d’intégrer des considérations sociales et environnementales dans les politiques commerciales et les chaines d’approvisionnement. La question d’une meilleure régulation du commerce international est posée dans le débat politique, bien que l’Union Européenne joue la plupart du temps l’autruche, car elle veut utiliser, à bas prix, les ressources du Sud pour les consommateurs/trices du Nord.
Dans ce contexte, le commerce équitable n’est définitivement pas un combat du passé ! Au contraire, il s’agit d’une niche d’innovation, d’un laboratoire dont toutes les politiques commerciales devraient s’inspirer. L’expérience dont Oxfam-Magasins du monde est un des acteurs est un modèle qui devrait devenir la norme plutôt que l’exception.
Le professeur De Schutter a précisé sa pensée au sujet du commerce équitable lorsqu’il était rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l’alimentation entre 2008 et 2014. Il avait à l’époque publié un rapport dont une section lui était intégralement consacrée et dans laquelle il identifiait toute une série de mesures dont les pouvoirs publics pourraient se saisir en s’inspirant de ce que le commerce équitable réalise sous différents modèles dans différentes régions du monde. Ce qui se fait pour le café, le chocolat ou une autre série de produits tropicaux devrait être étendu à l’ensemble des produits commercialisés et des filières qui s’y rapportent.
Olivier De Schutter pointe en premier lieu des mesures fiscales : il est évident pour lui que, compte tenu des bienfaits du commerce équitable, celui-ci devrait bénéficier d’un accès favorisé aux marchés, y compris ceux de l’Union Européenne. Ceci pour éviter que les consommateurs et les consommatrices qui paient une prime supplémentaire de commerce équitable ne s’en trouvent pénalisé.e.s.
Le professeur fait aussi des propositions en matière de transparence de l’information : la confusion reste en effet très grande dans le grand public entre les labels de plus en plus nombreux. Beaucoup de supermarchés en apposent sur leurs produits pour faire référence à des normes sociales et/ou environnementales et le consommateur s’y perd très souvent. Les gouvernements ont le devoir d’éviter le risque de confusion face à leur prolifération. Celle-ci entraine un nivellement par le bas et une perte de crédibilité de tous les labels quelle que soit leur exigence. En effet, on voit apparaitre des labels peu exigeants, accompagnés de mesures de contrôle peu convaincantes et peu coûteuses à utiliser pour les distributeurs. Les labels de qualité vont perdre dans ce jeu de concurrence à l’image.
La question de la croissance
Durant les assemblées régionales d’Oxfam-Magasins du monde, une question est revenue à plusieurs reprises : est-il bien raisonnable de favoriser le commerce en donnant des opportunités pour des coopératives, des petits paysans ou des petits artisans du Sud d’avoir accès aux marchés européens alors que le constat est de plus en plus partagé que la croissance ne constitue pas une manière de garantir le développement des sociétés ? Est-il souhaitable de « pousser à la consommation » dans une société que l’on voudrait plus sobre ?
Olivier De Schutter part de l’hypothèse qu’il y a consensus, en tous les cas parmi les bénévoles d’Oxfam-Magasins du monde, pour dire que la croissance du PIB par habitant, qui est encore utilisé par la grande majorité des médias et des gouvernements pour mesurer le progrès social n’a aucun sens. En effet, si cet indicateur inclut des choses très positives comme, par exemples, le nombre de vélos vendus sur une année ou la croissance des revenus des plus pauvres, il comptabilise aussi des éléments très problématiques. Un accident de la route va par exemple augmenter le PIB car il va falloir racheter une voiture, réparer les dégâts routiers, on va avoir besoin de soins de santé, etc. Le problème c’est que cette mesure du progrès social demeure très prégnante pour plusieurs raisons : elle est très facile à calculer, elle est acceptée et utilisée depuis le milieu des années 40 et il est très difficile de trouver un consensus mondial sur un autre indicateur unique qui mesure le progrès. Le PIB continue donc d’hypnotiser les médias et les politiques.
La croissance du PIB est également souvent assimilée à une croissance des possibilités d’emplois. Or c’est une erreur car tout gain de croissance ne signifie pas nécessairement des gains d’emplois. Quand bien même, la croissance du PIB ne donne aucune assurance quant au caractère décent et rémunérateur de l’emploi en question. O. De Schutter a donc les plus grands doutes sur cette assertion.
Il faut également questionner l’interdépendance entre les économies du Nord et du Sud. Nous vivons aujourd’hui dans un monde où toute une série d’indicateurs sont au rouge (croissance des émissions de CO2, destruction de la biodiversité, déséquilibre dans les cycles de l’azote) et où nous sommes en train d’excéder les limites planétaires. Au Nord, il nous faut arrêter d’urgence de nous donner la croissance comme objectif. Selon Olivier De Schutter, un développement durable à l’échelle mondiale doit passer par un scénario qu’il appelle un scénario de contraction-convergence. Cela signifie que les économies du Nord doivent à tout le moins être stationnaires et idéalement se contracter pour réduire la ponction sur les ressources naturelles que nos modes de vie entrainent, d’où l’idée de contraction. La convergence signifie qu’une grande majorité des pays du Sud ont besoin de croître pour que la pauvreté puisse se réduire. Il ajoute que si on pouvait mettre la lutte contre les inégalités en tête des priorités de ces pays, le dilemme entre la croissance de l’économie et la ponction des ressources, ainsi que les dégradations écologiques qui vont avec, serait nettement atténué. Le moindre point de croissance augmenterait le progrès social de manière beaucoup plus efficace que dans les pays du Nord : il faudrait effectivement moins de croissance et donc moins de destruction de l’environnement pour aboutir à une réduction de la pauvreté.
Le problème central réside dans le fait que quand les économies du Sud sont trop fortement dépendantes de leurs exportations vers le Nord, toute contraction au Nord signifie de moindres possibilités de développement pour les pays du Sud. Ce scénario de contraction-convergence n’est dès lors tenable que si on ajoute aussitôt que les flux commerciaux Nord-Sud doivent être réduits. Il faut accélérer le développement des marchés régionaux et les échanges Sud-Sud pour que les économies du Sud puissent se développer tout en ne faisant pas dépendre ce développement de la croissance ou du soutien de la consommation du Nord.
La mise en concurrence des différentes populations du Nord et du Sud pour l’utilisation des ressources participe à renforcer les inégalités. Olivier De Schutter a beaucoup travaillé sur la question de la viande qui est particulièrement instructive car illustrative du fait que nos modes de consommation au Nord ont un impact sur la capacité des populations au Sud à utiliser leurs ressources pour satisfaire leurs besoins de développement et pour en garantir l’accès aux plus pauvres. Pour ce qui concerne la viande, à côté des prairies permanentes où des animaux sont élevés et nourris à l’herbe et au foin, existent des filières de production de viande industrielles où les animaux sont élevés en batteries et reçoivent du soja produit en grande quantité au Brésil et en Argentine. Cela pour satisfaire notre goût et notre grande consommation de viande. Dans les immenses territoires utilisés pour que nous puissions nourrir notre bétail, nous sommes en concurrence avec des populations du Sud. Ces territoires seraient mieux mis à profit pour produire localement des denrées alimentaires, pour mettre en place des cultures vivrières qui nourriraient les communautés locales. Le commerce international met donc aussi malheureusement en concurrence le consommateur riche du Nord et les populations pauvres du Sud. Quand on met en concurrence des populations avec des niveaux de pouvoir d’achat tellement différents, ce sont évidemment les désirs des populations du Nord qui vont l’emporter sur les besoins essentiels des populations du Sud. Sur un marché, ce ne sont pas les besoins qui importent, mais bien la demande telle qu’elle s’exprime en pouvoir d’achat. Ce sont donc les plus riches qui peuvent surenchérir pour l’accaparement des ressources.
Olivier De Schutter parle d’une économie low cost pour décrire notre système économique, au Nord. L’objectif de la plupart des circuits commerciaux, ainsi que d’une majorité des choix politiques qui sont opérés, est de réduire un maximum les prix pour le/la consommateur/trice. Ceci au nom de l’idée qu’il est plus facile d’avoir une consommation standardisée de masse à bas prix que d’avoir des politiques sociales qui protègent les ménages pauvres. De cette façon, les ménages paupérisés auront quand même accès à une alimentation de base, fût-elle de faible qualité et malgré les externalités négatives que cela peut produire. La publicité crée aussi de nombreux besoins dans nos sociétés.
Le professeur De Schutter soutient que le commerce équitable n’est pas trop cher, mais qu’il est au contraire un commerce qui pratique un juste prix. Sortir de cette économie low cost va demander du courage politique, car ce qu’il conviendrait de faire c’est de renforcer le pouvoir d’achat des ménages les plus pauvres de manière à ce que chacun.e puisse payer le prix juste qui permettra de rémunérer les producteurs décemment. Il faut mettre en œuvre des politiques sociales ambitieuses pour protéger de la précarité les familles les plus démunies.
La question posée en assemblées régionales (celle d’une contradiction éventuelle entre favoriser la croissance au Sud par le commerce équitable et promouvoir un mode de vie plus sobre et durable au Nord) est donc une question complexe et extrêmement intéressante. Olivier De Schutter conclura en affirmant que la croissance au Sud reste importante pour la réduction de la pauvreté, mais que toutes les croissances ne se valent pas en termes d’impacts sur le développement durable et sur la réduction de la pauvreté. Le commerce équitable et la croissance des secteurs et des groupes de population qu’il permet répond à ce souci d’un rattrapage et d’une convergence. Mais le commerce équitable reste malheureusement toujours une niche qui concerne, dans le domaine des produits agricoles en tous les cas, un petit nombre de produits tropicaux et n’est pas encore du tout la norme du commerce international. L’essentiel du commerce est contrôlé par de très grandes entreprises transnationales qui contrôlent les chaines logistiques, qui mettent en concurrence les producteurs et qui les obligent donc à produire à prix bas. Ces entreprises vont former ce que l’on appelle des oligopsones. Leur position d’acheteurs est tellement dominante qu’elles peuvent influencer les choix des consommateurs. L’essentiel de la valeur payée en bout de chaine par le consommateur ou la consommatrice va aller à ces grandes entreprises qui dominent le commerce international. Le commerce équitable, c’est tout l’inverse de ce paradigme-là !
Il nous met également en garde contre le pouvoir des lobbies et nous parle de son expérience à l’international. Le poids de ceux-ci dans la décision européenne le scandalise. Il nous démontre l’influence des grandes entreprises sur les prises de décision au niveau international : si un grand nombre d’entre elles sont favorables à une décision, la probabilité est très grande que celle-ci soit adoptée par l’Union Européenne. A l’inverse, si un grand nombre de citoyen.ne.s s’expriment en faveur d’une mesure, les chances que ça influe la décision sont quasi nulles. Cela a été constaté par de nombreuses études empiriques.
Olivier De Schutter est convaincu que c’est au niveau local qu’il y a le plus de leviers d’actions, car le lobbying ne peut pas y passer inaperçu. Selon lui, le centre de gravité de la transition écologique se situe à ce niveau, le degré de liberté par rapport aux lobbies et aux grandes instances internationales y étant beaucoup plus grand.
Conclusion
Pour O. D schutter, nous avons, en tant que bénévoles d’Oxfam-Magasins du monde, non seulement un rôle à jouer dans le fait de faire vivre une alternative de consommation, mais aussi la possibilité d’être des porte-paroles d’un message résolument politique !
Il pense que le commerce équitable est bien plus que de donner des opportunités à certains fabricants de produits artisanaux ou à certains paysans d’avoir un travail rémunéré de manière décente et de développer des projets communautaires : c’est aussi un message politique qui est lancé. Et ce message politique, c’est qu’il existe une autre façon de faire du commerce qui est viable, qui est durable et dont les gouvernements devraient s’inspirer. Parce que le commerce non-équitable est en fait source de problèmes, de déséquilibres, de rapports de force dans les chaines d’approvisionnement dont les petits producteurs sont les perdants et qui occasionnent la destruction des écosystèmes.
Oxfam-Magasins du monde est porteur de pratiques sociales extrêmement intéressantes et importantes, mais aussi et surtout d’un message politique fort. Le monde du commerce équitable peut encore davantage construire des alliances avec des mouvements sociaux qui portent la souveraineté alimentaire. Celle-ci ne s’oppose pas, on l’a vu, au commerce en général. Mais elle s’oppose par contre à un commerce dont nous ne sommes pas réellement les acteurs et les actrices.
Bruno Gemenne
Responsable du service Mobilisation jeunes d’Oxfam-Magasins du monde