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Oxfam-Magasins du monde

Quelles garanties pour s’habiller plus durablement ?

Analyses
Quelles garanties pour s’habiller plus durablement ?
Face au scandale du Rana Plaza, de nombreux consommateurs voudraient s’habiller de manière plus respectueuse des travailleurs et de l’environnement. Mais ceux qui ont essayé peuvent témoigner de la difficulté d’acheter un vêtement éthique, équitable, biologique ou de manière plus générale durable : de nombreux labels couvrant tout ou partie des chaines textiles coexistent et se mélangent allègrement avec logos et marques indépendantes, le tout dans la plus grande confusion. Cette analyse a pour objectif de clarifier les garanties existantes en matière d’habillement durable, afin de faciliter le choix des consommateurs.
Campagne on-line de l’organisation Fashion Revolution pour une transparence accrue dans la fabrication des vêtements
Campagne on-line de l’organisation Fashion Revolution pour une transparence accrue dans la fabrication des vêtements

1. Introduction

Marre des fringues « kleenex » qui polluent et qui exploitent, voire qui tuent ? Face au scandale des « Rana Plaza and co. », de nombreux consommateurs décident de passer à l’action en s’habillant de manière plus respectueuse des travailleurs et de l’environnement. Les solutions passent notamment par le vêtement éthique / équitable / local, le seconde main (customisé ou pas)[1. Voir notamment les filières de vêtements de seconde main d’Oxfam-Magasins du monde et d’Oxfam Solidarité.], ou même la location[2. Voir l’exemple de l’entreprise Tale Me à Bruxelles, qui loue des vêtements pour bébés, enfants et futures mamans. Source : achACT. Décembre 2016. Ranaplaza.be. Respecter les droits humains dans l’industrie de l’habillement. #3 : pouvoir d’achat.].
Mais quiconque s’y est déjà frotté peut témoigner de la difficulté à acheter un vêtement éthique, équitable ou de manière plus générale durable. En comparaison avec le secteur alimentaire par exemple, dans lequel des marques (ex. Oxfam, Ethiquable) ou labels (ex. Fairtrade) « phares » permettent de s’y retrouver relativement facilement, l’habillement est plus complexe : de nombreux labels (éthiques, équitables, biologiques,…, couvrant tout ou partie des chaines textiles) coexistent et se mélangent allègrement avec logos et marques indépendantes, et ce dans la plus grande confusion. Selon « l’Eco-Textile Labelling Guide 2014 », il existerait ainsi plus de 60 labels et standards durables dans le seul secteur textile.
Cette analyse a pour objectif de clarifier les garanties existantes en matière d’habillement durable, afin de faciliter le choix des consommateurs. Nous examinerons pour cela quelques standards plus en détail : l’initiative éthique Fair Wear Foundation (FWF), le label de textile biologique GOTS (Global Organic Textile Standard), les standards coton et textile de Fairtrade international, et enfin, le système de garantie équitable WFTO. Ces standards ont été choisis en fonction de critères de notoriété, de leur spécificité vis-à-vis du secteur textile, ainsi que leur proximité avec les principes du commerce éthique et équitable.

2. Éthique, équitable, durable, biologique : quézako ?

Tout d’abord, il peut sembler utile de rappeler quelques concepts, notamment les différences entre commerces éthique, équitable, durable et biologique.
Le commerce éthique concerne principalement les conditions de travail dans les centres de production industriels conventionnels. Il couvre ainsi surtout les relations employeur / employés au sein des entreprises, cherchant à faire respecter les droits fondamentaux du travail, tels que définis notamment par l’Organisation Internationale du Travail (OIT) et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) (ex. conditions de santé et de sécurité, absence de travail forcé ou des enfants)[3. Browne A. 2000. Organic Production and Ethical Trade: definition, practice and links. Food Policy 25, p. 69-89.]. De nombreux labels de commerce éthiques concernent donc le secteur du textile industriel, secteur intensif en main d’œuvre s’il en est.

Les standards / initiatives volontaires du secteur privé[4. Newitt K. 2013. Private sector voluntary initiatives on labor standards. Background paper for the World Development Report 2013.]

Les initiatives volontaires (ou standards) du secteur privé sont des principes divers et normes auxquels une entreprise accepte volontairement de se plier dans le cadre de ses activités. De manière générale, elles encadrent le comportement des firmes et de leurs partenaires commerciaux (fournisseurs et éventuels sous-traitants), dans un ou plusieurs domaines du développement durable : économique (ex. pratiques commerciales), social (ex. droit du travail) ou environnemental (ex. polluants). Mais les standards varient également en fonction des secteurs (ex. habillement), des zones géographiques (ex. pays en voie de développement), des structures de gouvernance (ex. multi-parties prenantes) et des systèmes de suivi (ex. tierce partie). Parfois, ces standards peuvent consister en de simples principes de bonne conduite. Ils sont alors généralement dénommés « codes de conduite » et rattachés à des politiques plus globales de responsabilité sociale des entreprises (RSE). Les standards les plus connus des consommateurs sont les labels (produits), un cas spécifique dans lequel un logo est apposé sur le produit afin d’informer le consommateur du respect du cahier des charges[5. PFCE. 2015. Guide international des labels de commerce équitable.].

Historiquement, le commerce équitable couvre quant à lui principalement les conditions de l’échange commercial avec des petits producteurs indépendants (agricoles ou artisanaux). Comparé au commerce éthique, aux critères essentiellement sociaux, il se concentre donc sur les aspects de développement économique et d’organisation collective des petits producteurs et artisans du Sud (ex. prix minimum, prime de développement, fonctionnement démocratique). Avec le temps, il a cependant inclus de plus en plus de critères sociaux et environnementaux, notamment avec l’arrivée de nouveaux standards tels qu’Ecocert équitable ou Naturland Fair (concurrents du label historiquement monopolistique Max Havelaar / Fairtrade). Certains labels équitables ont par ailleurs élargi leurs activités aux plantations (dans lesquelles des grands propriétaires emploient une large main d’œuvre) ainsi qu’à d’autres secteurs tels que l’extraction minière ou le textile industriel (voir les standards de Fairtrade International et FT USA plus bas), atténuant ainsi la frontière entre commerce éthique et équitable.
Le commerce durable est un concept plus général, qui tente d’inclure toutes les composantes de la durabilité – économique, sociale et environnementale. Ses promoteurs mettent par exemple en avant la création de valeur économique, la protection des ressources environnementales, la transparence et l’imputabilité, etc.[6. Définition donnée par l’Institut International pour l’environnement et le développement en 2000.]. Englobant en apparence les notions de commerces équitable et éthique, ses critères sont en réalité beaucoup plus vagues et souvent peu exigeants. Au final, les labels de commerce durable (ex. Better Cotton Initiative, Cotton Made in Africa) sont des systèmes surtout adaptés au modèle d’affaires des multinationales.
Enfin, le terme de biologique concerne historiquement et majoritairement l’agriculture. En opposition à l’agriculture industrielle, l’agriculture biologique exclut les intrants chimiques (engrais de synthèse ou pesticides) et les OGM, tout en exigeant des modes de production favorables à la biodiversité, à la fertilité des sols et aux cycles biologiques. La certification GOTS (Global Organics Textile Standard) permet néanmoins d’étendre le concept aux produits textiles, en garantissant l’origine biologique des fibres (ex. coton) et en exigeant le respect de critères sociaux et environnementaux sur les étapes de production et de transformation textile ultérieures.

3. Fair Wear Foundation

fairwearÀ seigneur tout honneur, nous commencerons notre tour d’horizon des labels textiles par l’une des plus anciennes tentatives de régulation privée. La Fair Wear Foundation (FWF) est une ONG créée en 1999 aux Pays-Bas à l’initiative de plusieurs parties prenantes, dont la Clean Clothes Campaign (CCC), des syndicats et des marques. Via son standard éthique du même nom, elle vise à instaurer des conditions de travail décentes dans le secteur de l’habillement de tous les pays où ses entreprises membres se fournissent[7. La FWF est présente dans plus d’une dizaine de pays producteurs, mais se concentre plus particulièrement sur le Bangladesh, la Chine, l’Inde et la Turquie. Ces 4 pays prioritaires représentent 80% de la production de ses marques membres. Ces dernières étaient début 2017 plus d’une centaine, en provenance majoritairement de Hollande, du Danemark, d’Allemagne et de Suisse. En tant que membres, ces marques doivent payer une cotisation annuelle, variable en fonction de leur chiffre d’affaires et du nombre de fournisseurs. Une entreprise reste membre aussi longtemps que les contrôles réalisés par la FWF sont positifs. Source : www.fairwear.org. Consulté le 11/01/2017. ]. Les fournisseurs (uniquement des usines de confection) doivent pour cela respecter une série de critères basés essentiellement sur les normes de l’OIT et de la DUDH[8. Ce Code of Labour Practices, élaboré de manière négociée entre les différentes parties prenantes de l’organisation peut se résumer en huit points : pas de travail forcé ni de travail des enfants, pas de discrimination (à l‘embauche, dans les salaires ou l’accès à la formation), droit de grève, de négociation collective et d’appartenance à un syndicat, salaires vitaux, temps de travail limité à 48h/semaine avec une journée de repos, droit à des conditions sanitaires et de sécurité minimum, et respect des standards légaux contractuels. Source : CTB. Janvier 2010. Commerces équitable & durable : quels labels et systèmes de garantie pour mon business ?]. Différents instruments sont utilisés : des audits d’usines, des enquêtes sur les marques elles-mêmes[9. Appelés « performance checks », ils analysent par exemple leurs systèmes de contrôle interne.], un système de plaintes pour les parties prenantes internes et externes, l’obtention d’informations via des ONG ou des syndicats locaux, ainsi que des programmes d’éducation des travailleurs.
On le voit, l’approche de la FWF est assez spécifique et se distingue des standards éthiques plus classiques sur plusieurs points :

  • Contrairement au SA8000 par exemple, qui fait reposer sur les fournisseurs la totalité des responsabilités et des coûts de mise aux normes, l’objectif est ici de s’adresser aussi et avant tout aux marques. L’idée est que même si elles n’emploient pas directement de travailleurs, leurs pratiques jouent souvent un grand rôle dans les violations du droit du travail (ex. délais de livraison très courts). Cette approche globale de FWF pour responsabiliser tous les acteurs de la chaine, y compris les acheteurs, permet en théorie de trouver des solutions plus durables.
  • La démarche se veut également plus souple, dans un esprit d’amélioration continue des pratiques. Il ne s’agit donc pas ici de certifier des chaines parfaites mais de garantir que l’entreprise est en recherche d’amélioration constante pour appliquer un maximum de normes de l’OIT.
  • La FWF est bien implantée localement, grâce à de nombreuses et étroites collaborations avec les ONG, les syndicats, les industries et les autorités publiques. Cela lui permet d’obtenir davantage d’information (et de meilleure qualité) que la moyenne sur les conditions réelles de travail au sein des usines, notamment via des auditeurs plus compétents (cf. bonne connaissance de la langue, du contexte, entretiens avec les travailleurs en dehors des usines, etc.).
  • Elle offre également un programme de formation assez complet, qui vise à dépasser le système des audits via le renforcement des travailleurs et la création de relations de travail plus ouvertes et collaboratives. L’idée est aussi ici de limiter les problèmes d’absentéisme et de rotation du personnel, avec toutes les conséquences sociales et économiques que cela entraine habituellement.
  • Les rapports annuels, les rapports des suivis de performance des marques, ainsi que le suivi des plaintes sont disponibles librement sur le site internet de la FWF, ce qui démontre un niveau relativement élevé de transparence.
  • La FWF ne s’affiche pas comme un label produit, mais comme la garantie que l’entreprise membre développe une démarche de progrès dans ses pratiques d’approvisionnement. Un produit d’une marque membre de FWF n’est donc pas garanti en tant que tel. Néanmoins, une marque est autorisée à communiquer sur son appartenance à la FWF via un label sur le produit quand 60% de ses fournisseurs sont vérifiés[10. FWF. October 2009. Manual for companies affiliated to Fair Wear Foundation. ].

Du côté plus négatif, ces différentes spécificités de l’approche de FWF en font un système assez lent, notamment pour la recherche et la collaboration avec les partenaires locaux. Mais de nouveau, le but n’est pas ici d’obtenir immédiatement une chaine 100% éthique. On pourrait également critiquer le fait que, comme chez d’autres standards, les entreprises peuvent améliorer leur image alors même que tous les critères ne sont pas nécessairement atteints, en particulier sur la question du salaire vital (voir plus bas l’analyse du standard textile de Fairtrade).

En Belgique[11. Achact. 08/08/2016. Fair Wear Foundation.]

De nombreuses entreprises membres de la FWF écoulent leurs produits en Belgique. Sept d’entre elles sont des entreprises belges. Elles sont actives dans le secteur de la mode, du vêtement promotionnel et du vêtement de travail.

  • Bel-Confect– vêtements de travail – membre FWF depuis 2016
  • Claudia Sträter(FNG Group) – vêtements de mode – membre FWF depuis 2015
  • Bel&Bo– vêtements de mode – membre FWF depuis 2014
  • JBC– vêtements de mode – membre FWF depuis 2015
  • Mayerline– vêtements de mode – membre FWF depuis 2010
  • Stanley & Stella– vêtements promotionnels – membre FWF depuis 2011
  • B&C– vêtements promotionnels – membre FWF depuis 2009

Les autres reproches faits à la démarche incluent sa limitation à l’étape de confection[12. Les étapes de transformation intermédiaire que sont par exemple le filage et le tissage sont généralement moins ciblées que la confection par les tentatives de régulation. Même si elles sont moins intensives en main d’œuvre et moins liées au produit, à la marque ou au consommateur, elles sont pourtant l’objet aussi de nombreuses violations du droit du travail. Source : Veillard P. Décembre 2015. Travail décent et textile équitable. Impact du commerce équitable sur la durabilité des chaînes textiles. Analyse de contexte globale.], ainsi que l’absence d’indépendance des audits. En effet, la FWF forme elle-même ses auditeurs à ses critères et à son code de conduite. Au contraire du standard SA8000 par exemple, qui fait faire les audits par des organismes professionnels indépendants et agréés selon la norme IS065 (évaluation tierce partie), ce qui améliore en théorie la crédibilité. En théorie car du fait des nombreuses fraudes ou manipulations, l’hétéro-vérification, c’est-à-dire l’implication d’organisations locales, semble avoir plus d’impact sur le long terme, en plus d’être souvent moins coûteuse[13. Voir aussi (p. 37) : Veillard P. Décembre 2015. Travail décent et textile équitable. Impact du commerce équitable sur la durabilité des chaînes textiles. Analyse de contexte globale.]. Enfin, on peut aussi se poser des questions sur l’utilisation du terme de « fair » dans le nom de l’initiative, étant donnée son approche plus éthique (droits fondamentaux des travailleurs dans un contexte industriel) qu’équitable (même si comme on le verra plus bas, la différence entre les deux approches tend à s’estomper).
En résumé, la FWF est une initiative multipartite spécialisée dans le textile dont l’approche est assez originale à plusieurs points de vue : son but non lucratif, l’équilibre des parties prenantes, sa démarche de progrès axée sur les marques, son système d’hétéro-vérification plutôt performant et crédible, sa transparence, etc. Du point de vue du consommateur, l’idée ici n’est pas d’acheter un produit « clean », mais bien d’encourager une marque à améliorer les conditions de travail dans les usines de confection participant à ses filières d’approvisionnement. Il est cependant peu probable que tous les consommateurs puissent faire la différence avec des standards plus classiques, en particulier du fait de la présence d’un label sur les produits.

4. Global Organics Textile Standard

Une autre piste pour s’habiller plus durablement est de choisir le textile biologique. Comme expliqué précédemment, le principe est ici d’étendre la certification biologique, qui s’applique initialement aux fibres agricoles (ex. coton), aux étapes de transformation ultérieures (le fil, le tissu et in fine les vêtements). Concrètement, cela signifie qu’un produit textile étiqueté « GOTS » :

  • contient au moins 95 % de fibres biologiques certifiées (ou 70 % dans le cas d’une étiquette « composé de fibres biologiques ») ;
  • et que ces fibres ont été transformées selon une série de critères sociaux (conventions de base de l’OIT[14. Nommément, l’élimination du travail forcé (Conventions 29 et 105), la liberté syndicale et le droit à la négociation collective (C87, C98, C135, C154), l’amélioration des conditions de travail (C155), l’abolition du travail des enfants (C138, C182), la suffisance des salaires (C95, C131), des horaires de travail décents (C1, C14, C30, C106), l’abolition de la discrimination (C100, C111), la régularité de l’emploi (C158, C175, C177, C181) et l’abolition du traitement brutal et inhumain (C29, C105). Global Organic Textile Standard. Consulté le 13/01/2017.]) et environnementaux (essentiellement l’interdiction ou la limitation de produits chimiques nocifs tels que métaux lourds ou les formaldéhydes, ainsi que les aspects de gestion des déchets, de l’eau, etc.).

gotsÀ première vue, le système GOTS se révèle donc assez complet puisque combinant matières premières durables avec des étapes de transformation plus écologiques et respectueuses des droits des travailleurs.
Mais si l’on se met à la place d’un consommateur préoccupé essentiellement par les problématiques sociales, il se révèle in fine assez faible. Les critères sociaux du GOTS ne constituent en effet qu’un ajout à un cahier des charges axé historiquement en priorité sur l’environnement. En matière purement de protection des travailleurs, nous sommes donc ici dans une approche orientée plutôt sur la diminution des risques. Formulé de manière plus caricaturale : l’idée est de ne pas se retrouver avec un reportage sur le travail des enfants dans l’usine fournissant ses tee-shirts !
Cet aspect de « minimum syndical » sur les critères éthiques est renforcé par la difficulté pour un auditeur de se spécialiser à la fois sur le social et l’environnemental, les méthodes de vérification pouvant être assez différentes (ex. respectivement des entretiens avec des travailleurs vs. des analyses chimiques d’échantillons prélevés aléatoirement). On peut donc supputer qu’un auditeur GOTS, lors de son inspection des conditions de travail d’une usine, se retrouve vite à simplement « cocher des cases »[15. Siegmann K.A., Merk J., Knorringa P. May 2014. Volontary initiatives in global value chains. Towards labour-led social upgrading? ISS working paper n° 586.].
Enfin, un autre aspect qui tend potentiellement à diminuer l’exigence des critères du GOTS est le fait qu’il soit une norme d’harmonisation. A l’image du secteur alimentaire et de son label européen, le GOTS correspond en effet au « dénominateur commun » de plusieurs standards nationaux aux cahiers de charges différents, notamment l’Organic Trade Association aux Etats-Unis, Demeter en Europe ou encore la Soil Association au Royaume-Uni. Si la démarche permet une reconnaissance accrue auprès des consommateurs (B2C) et facilite les échanges entre les acteurs du secteur (B2B), elle produit comme souvent une forme de nivellement par le bas des critères[16. Mailloux C. Février 2010. Les certifications comme outils d’amélioration des conditions de vie des collectivités du sud : étude de cas d’une filière textile biologique et équitable en Inde. Mémoire de Master en sciences de l’environnement.].
En dépit de ces différentes faiblesses au niveau social, le GOTS présente une spécificité intéressante, en particulier quand il est combiné avec des standards aux critères éthiques / équitables plus élevés : il oblige tous les opérateurs, depuis la post-récolte jusqu’à la confection, à séparer leur production certifiée biologique. Même si cela représente des contraintes manufacturières et donc un coût certain, cela permet d’assurer la traçabilité tout au long de la chaine. Contrairement à un standard tel que FWF (voir plus haut), le consommateur qui achète un vêtement GOTS peut donc être certain que le produit lui-même est couvert par un minimum de garanties sociales et environnementales.

5. Fairtrade International [17. Pour plus de détails sur les standards Fairtrade, voir aussi : Veillard P. Décembre 2015. Travail décent et textile équitable. Impact du commerce équitable sur la durabilité des chaînes textiles. Analyse de contexte globale.]

5.1 Standard coton

standardcotonPrincipal certificateur équitable, on pourrait penser que Fairtrade (anciennement FLO[18. Fairtrade Labelling Organisation.]) couvre depuis longtemps le secteur textile. Il n’en est rien, l’organisme n’y est présent que depuis 2005 et seulement de manière limitée dans un premier temps, puisqu’uniquement sur l’étape de production de coton. Cette certification coton est très similaire aux autres matières premières agricoles, puisqu’elle assure un prix minimum (variable selon les variétés et régions), une prime de développement, un préfinancement et le respect d’une série de critères sociaux (droit du travail principalement, sur la base de conventions de l’OIT) et environnementaux (interdiction des OGM, limitations des pesticides, pratiques agro-écologiques, culture pluviale, etc.).
Plusieurs études ont démontré un impact significatif du système, en particulier en matière d’organisation collective et démocratique des producteurs (qui leur permet notamment d’obtenir de meilleurs prix)[19. Fairtrade Foundation. May 2012. Fairtrade cotton. Summary and management response to an independent impact study.]. Du côté négatif, la principale critique, en plus des faibles volumes certifiés[20. Il ne représentait ainsi en 2012 que 0,1% de la production mondiale de coton, assez loin des standards Cotton made in Africa (0,6%) et surtout Better Cotton Initiative (2%). Ces difficultés seraient liées à des problèmes logistiques d’acheminement du coton jusqu’aux usines, et à l’interdiction par Fairtrade de transformer ce coton en Chine, de par la répression des libertés syndicales qui y règne toujours. Une solution apportée par Fairtrade a été le lancement en 2013 d’une certification ingrédients plus souple dénommée « Fairtrade Sourcing Partnership » (FSP).], concerne le caractère trompeur du label sur le produit : s’il indique bien « coton certifié », il a été démontré que la plupart des consommateurs pensent acheter un vêtement entièrement équitable. Or ce que Fairtrade demande aux autres opérateurs de la chaîne utilisant le coton équitable (filage, tissage, confection, etc.) est très basique : seulement « faire des efforts » pour respecter 11 conventions de l’OIT[21. Veillard P. Août 2013. L’impact de la hausse et de la volatilité accrues des cours sur les acteurs de la filière coton. Analyse Oxfam-Magasins du monde.], et ce avec des systèmes de vérification très variables[22. Différents systèmes sont acceptés pour prouver le respect du droit du travail sur ces maillons, notamment les garanties WFTO, SA8000, ETI, FWF, FLA, WRC ou même une lettre d’un syndicat accrédité à IndustriAll.].

5.2 Standard textile

Afin de pallier ces défauts, Fairtrade a lancé courant 2016 un nouveau standard textile, après de nombreuses recherches et consultations. Ce standard complète la couverture équitable de la chaine en ajoutant au standard coton ci-dessus[23. Ou à d’autres certifications de fibres durables, incluant entres autres du coton Cmia (Cotton made in Africa) ou biologique.] une certification sur toutes les étapes postérieures, de l’égrenage du coton jusqu’à la confection, y compris les sous-traitants. Les marques sont elles aussi incluses, puisqu’elles doivent entre autres établir des contrats justes, fiables et prévisibles pour faciliter les investissements à long terme dans l’amélioration des conditions de travail.
En plus de ce niveau de couverture assez unique, le standard inclut des critères assez développés en matière de liberté d’association et de négociation collective, ainsi qu’un processus de transition en 6 ans vers un salaire vital[24. Le montant du salaire vital est calculé sur base des accords conclus par les syndicats locaux, ainsi que sur une définition et une méthodologie de calcul communes à l’alliance ISEAL (méthodologie dite « Anker », du nom du chercheur de l’OIT l’ayant développé).]. Un système de plaintes permet également aux travailleurs ou à des tierces parties de signaler des violations du droit du travail de manière directe et anonyme. Les autres critères sont relativement classiques et communs à la plupart des codes du commerce éthique (critères sur la sécurité, le travail forcé ou des enfants, la discrimination, etc.).
Des acteurs tels que Peter Williams, représentant d’Oxfam Grande-Bretagne au sein du WRAC (« Workers’ Rights Advisory Committee » de Fairtrade), estiment que ce nouveau standard est « crédible et capable d’initier la construction de chaines équitables à grande valeur d’exemplarité ». D’autres acteurs ont des positions plus critiques, en particulier la Clean Clothes Campaign (CCC), qui juge par exemple la période transitoire de six ans vers un salaire vital « irresponsable vis-à-vis des travailleur(se)s » et « tromperie des consommateurs ». Pour l’ONG, cela constitue un « avantage marketing indu » permettant à une marque de se revendiquer équitable avant même de devoir payer un salaire vital[25. Luginbühl C. 21/01/2016. Un label « Fairtrade » pour le textile? Altermondes n°244.]. Elle est plus généralement très critique envers les audits sociaux, sur lesquels Faitrade fait reposer une grande partie de son système. Ces audits ne donnent selon elle que des instantanés d’une situation et sont donc totalement inefficaces sur des chaines aussi complexes que celles de l’industrie textile. La réponse de Fairtrade est que son système intègre une approche novatrice en matière d’assurance pour pallier les faiblesses les plus courantes du modèle d’audit (ex. amélioration de la compétence des auditeurs, renforcement de la participation des travailleurs au processus, etc.).
Au final, Oxfam-Magasins du monde (OMM) préfère retenir les éléments positifs de ce standard textile et de son programme de développement associé. Il constitue selon nous une avancée importante vers l’amélioration des droits des travailleurs du textile par l’introduction d’éléments innovants en matière de salaire vital, d’empowerment des travailleurs et de fiabilité des audits. Du fait de son lancement très récent, il n’est par contre pas encore possible d’acheter en Belgique des produits bénéficiant de cette certification.

6. Système de garantie WFTO

wftoEn attendant, la seule garantie équitable s’appliquant à des produits textiles existants est celle de la WFTO (World Fair Trade Organisation)[26. Le seul autre label équitable que l’on retrouve dans le secteur textile est le label Fair Trade USA. Comme son nom l’indique, c’est un système étasunien et ne concerne donc pas à priori les consommateurs belges ou européens, sauf dans les cas (très limités) où il s’applique à des organisations productrices du Sud qui fournissent des acheteurs équitables européens. Son standard textile est très similaire au SA 8000 (ce qui est vendu comme un avantage, car cela permet de limiter le nombre d’audits). Comme lui, il se réfère majoritairement aux normes internationales de l’OIT, qu’il fait appliquer sur base d’audits tierce partie réguliers, principalement sur l’usine en bout de chaine (c’est-à-dire sur la couture mais pas sur les autres maillons tels que filage, coton ou importateurs). L’ajout majeur de ce standard textile est un système de prime Fairtrade, représentant en valeur de 1 à 10% du prix FOB (« free-on-board », c’est-à-dire le prix avant importation) en fonction de la proximité des salaires avec un salaire vital. Ce label a été beaucoup critiqué à sa sortie par des organisations telles que Fair World Project, qui n’y voient pas d’amélioration majeure par rapport au système général d’audit social prévalant dans l’industrie. Sont notamment reprochés la faible couverture de la chaine, les salaires non vitaux (en dépit de la prime), ou encore l’absence de mesure proactive en faveur de l’empowerment ou de la liberté d’association des travailleurs. Plus d’informations sur : Fair World Project. 05/11/2013. Statement regarding Fair Trade USA (FTUSA) apparel program.]. Son approche est un peu différente des systèmes de certification classiques.  Au lieu de fournir à une marque lambda un service de labellisation produit sur différentes étapes de la chaine, le système WFTO offre une garantie « organisation » à des acteurs spécialisés équitables. Ces derniers se fournissent généralement en produits équitables de manière plus directe que les acteurs conventionnels et souvent auprès de collectifs organisés d’artisans (et moins fréquemment auprès d’usines aux relations employeur / employés classiques)[27. Ce sont souvent des petits ateliers de confection communautaires ou des groupements de travailleurs à domicile. Il existe aussi des unités de production industrielles mais elles sont elles-mêmes plus petites que la moyenne du secteur et intègrent souvent plusieurs étapes de transformation (ex. Amstrong Knitting Mills, Assisi Garment ou Rajlakshmi en Inde).].
C’est ce que l’on appelle la filière intégrée, dans laquelle la plupart des organisations sont de faible taille et ont comme business principal le commerce équitable. On retrouve le plus souvent dans cette filière des marques textiles de niche, spécialisées uniquement dans le vêtement équitable ou biologique (ex. People Tree au Royaume-Uni / Japon, Altromercato en Italie, EZA en Autriche ou Oxfam Intermon en Espagne). Quant à la distribution, elle se fait généralement au travers de réseaux alternatifs du type magasins du monde (ex. Oxfam-Magasins du monde en Belgique ou Artisans du Monde en France).
Les principales caractéristiques distinctives du système de garantie WFTO sont :

  • Les critères, basés sur les dix principes du commerce équitable de la WFTO[28. WFTO. 10 principles of Fair Trade. Consulté le 16/01/2017.], sont très axés processus, c’est-à-dire qu’ils permettent aux membres de s’améliorer de manière continue.
  • Le système de contrôle utilisé se veut à la fois crédible et abordable, en se basant sur un mélange d’évaluations internes et externes : rapports d’auto-évaluation, audits externes, visites / évaluations par d’autres membres WFTO et mécanisme de surveillance / plaintes (« Fair trade accountability watch »). Les coûts des audits sont limités grâce un système associant la fréquence des contrôles aux performances passées des organisations, ceci afin de garder l’outil accessible à un maximum d’organisations[29. Ce système de garantie WFTO a été récemment adapté. Parmi les changements, le principal est l’amélioration de la fiabilité des contrôles. L’ancien système utilisait également un mix d’auto-évaluation et d’audits, mais ces derniers étaient très limités en nombre. Ce changement s’est fait principalement sous la pression des membres Nord de la WFTO, soucieux de la crédibilité de leurs importations. Source: Veillard P. Février 2013. La certification organisation WFTO. Analyse Oxfam-Magasins du monde. ].
  • La plupart du temps de petite taille et impliquées historiquement / philosophiquement dans le commerce équitable, les organisations partenaires du Sud sont proches de leurs publics bénéficiaires, ce qui assure une forme de légitimité et de garantie quant à la qualité sociale des produits.
  • Enfin, une nouveauté de la nouvelle version de ce système de garantie est l’introduction d’un système de labellisation produit, c’est-à-dire la possibilité d’apposer le logo WFTO sur l’emballage du produit. Ce système permet aux vendeurs et partenaires membres WFTO de mieux communiquer leur engagement équitable, ainsi que de donner aux produits et producteurs un accès aux canaux de commercialisation conventionnels[30. Pour plus de détails sur le label produit et les autres nouveautés introduites par le nouveau GS, voir : Giubilo F., Veillard P. Septembre 2015. Le label WFTO : de quoi il s’agit et dans quel marché il peut être trouvé ? Analyse Oxfam-Magasins du monde.].

Les différentes composantes du système de garantie WFTO
Les différentes composantes du système de garantie WFTO

Le système de garantie WFTO se distingue donc des autres systèmes de certification textile essentiellement par sa spécialisation « organisations équitables », et de manière corrélée, sa souplesse et son caractère peu onéreux. Ces propriétés le rendent clairement intéressant pour des chaines aussi longues et complexes que les chaines textiles[31. Pour plus de détails sur le label produit et les autres nouveautés introduites par le nouveau GS, voir : Giubilo F., Veillard P. Septembre 2015. Le label WFTO : de quoi il s’agit et dans quel marché il peut être trouvé ? Analyse Oxfam-Magasins du monde.]. Si on le compare avec le standard textile de Fairtrade par exemple[32. Ce manque de fiabilité est toutefois compensé par l’engagement équitable de ses organisations membres.], il est sans doute moins crédible au niveau des contrôles, mais on peut considérer que ce manque de fiabilité est compensé par l’engagement équitable de ses organisations membres.
Au Sud, cela signifie souvent plus de participation et d’empowerment des travailleurs (ex. gouvernance démocratique), gage par exemple de meilleures conditions de travail ou de l’absence de sous-traitance. Au Nord, cela peut amener davantage de réactivité et/ou d’innovation, certaines PME (petites et moyennes entreprises) étant par exemple à la pointe en matière de gestion des approvisionnements, de relations avec les fournisseurs, de qualité sociale des produits (ex. forme de commerce direct, visites régulières, programmes de support).

L’offre en vêtements équitables en Belgique

Aujourd’hui, l’offre en vêtements équitables en Belgique est relativement faible et dispersée, seuls quelques magasins spécialisés[33. Quelques exemples : Ozfair et Couleur Sud dans les régions Wallonie / Bruxelles ; Yak & Yeti, Today is a good day ou Ethnics en Flandre.] commercialisant des gammes relativement limitées et typées de produits. Certaines initiatives visent cependant le développement de l’offre, tel le programme Gent Fair Trade de la ville de Gent (historiquement un centre industriel textile très important) : ateliers de sensibilisation, soutien aux entrepreneurs, organisation annuelle d’une « Fair fashion fest », animation de groupes de bénévoles, etc. Au milieu des années 2000, Oxfam-Magasins du monde (OMM) avait elle-même développé une collection de vêtements équitables. Dénommée « Kutim » et rattachée à la gamme plus large de produits artisanaux « Made In Dignity » (MID), cette collection n’a pas perduré. Néanmoins, la démarche a permis à OMM de développer une certaine expérience, notamment en matière de suivi et d’évaluation (un système d’audit externe avait été rajouté au système de garantie de la WFTO, à l’époque fondé quasi uniquement sur l’auto-évaluation des partenaires[34. Cette évaluation de terrain était effectuée à une fréquence régulière par une consultante externe, sur base du code de conduite de la campagne vêtements propres (CVP). Ce code est une sorte de guide normatif sur les règles et critères à mettre en place pour créer un système de vérification crédible. Source : Mailloux C. Février 2010. Les certifications comme outils d’amélioration des conditions de vie des collectivités du sud : étude de cas d’une filière textile biologique et équitable en Inde. Mémoire de Master en sciences de l’environnement.]).

Cette filière n’est néanmoins pas exempte de défis. On peut citer par exemple le caractère parfois « typé ethnique » des vêtements équitables, les coûts de production souvent élevés (cf. économies d’échelles limitées, en lien avec des modes de production peu ou pas du tout industrialisés) ou encore le faible niveau de garantie sur certaines étapes de fabrication[35. Certaines organisations se contentent par exemple d’acheter leur tissu directement sur le marché local, parfois sans en connaitre l’origine et les conditions de production. Au-delà des questions de crédibilité, cela pose de nombreux problèmes en termes de qualité, de délais et de fiabilité des approvisionnements. Source : Altromercato. 2012. Quality in Fashion: a technical handbook for fair trade artisans.].
Mais c’est surtout dans le domaine des salaires que les principes de WFTO se heurtent aux réalités de terrain. En théorie, le prix équitable payé et négocié aux organisations de producteurs doit permettre à ces derniers de percevoir un salaire vital. Mais des enquêtes ont montré que les salaires sont la plupart du temps bien plus proches des salaires minimums légaux que des salaires vitaux[36. Williams P. 2013. Fair prices & fair wages. A report for the European Fair Trade Association.]. Les organisations se heurtent ici à de nombreux obstacles, allant de la définition / méthodologie de calcul du salaire vital, à la viabilité des activités de l’organisation (du fait de l’augmentation des prix induite par des salaires plus élevés), jusqu’aux modes de paiement (souvent à la pièce, ce qui pose l’enjeu du montant des commandes). La mise en œuvre d’une politique de salaire vital au sein de la WFTO, via une stratégie sur 5 ans, devrait permettre d’améliorer les pratiques des organisations membres[37. Suite à la recherche d’un consultant externe (P. Williams) effectuée pour l’European Fair Trade Association (EFTA), la WFTO a créé un groupe de travail en 2013, groupe ayant amené au développement de la stratégie 2015 sur le salaire vital. Cette dernière prévoit notamment la création d’un groupe de travail pilote de 15 membres, mandaté pour tester sur le terrain les méthodes de calcul de salaire vital de DAWS (Dutch Association of World Shops) et de SAI (Social Accountability International). Source : Pinault L. Décembre 2015. Commerce équitable : prix juste et salaire vital ? Analyse Oxfam-Magasins du monde.].

7. Conclusions

Au travers de l’examen de différents standards textiles, on a pu détailler dans cette analyse les différences majeures entre commerces éthique, biologique et équitable.
L’initiative éthique FWF est surtout fondée sur une démarche de responsabilisation des marques, pour une amélioration progressive des conditions de travail au sein de leurs réseaux de fournisseurs. Les standards équitables Fairtrade et WFTO ont une approche davantage basée sur la construction d’une chaine complète et exemplaire, afin de garantir au consommateur un produit 100% équitable. Le standard GOTS étend quant à lui les principes biologiques appliqués aux fibres aux étapes ultérieures de transformation, tout en assurant une bonne traçabilité et un niveau minimum de protection des travailleurs.
Toutes présentent bien sûr des limites plus ou moins prononcées, inhérentes au principe de régulation volontaire. Exemples : des critères parfois trop faibles ou un manque d’indépendance ou de rigueur de la vérification, des conflits avec les pratiques d’achat des marques, etc.[38. A ce sujet, voir également (p.38) : Veillard P. Décembre 2015. Travail décent et textile équitable. Impact du commerce équitable sur la durabilité des chaînes textiles. Analyse de contexte globale.]. Plus particulièrement, un problème propre à ces codes est leur nombre et leur variété, générant notamment une « fatigue de l’audit » chez les producteurs et une confusion chez la plupart des consommateurs[39. Des tentatives sont régulièrement faites pour promouvoir une coopération accrue entre les différentes initiatives, afin d’accroître leur impact global. Les exemples incluent l’alliance ISEAL, ou plus spécifiquement au secteur textile, le projet pilote « Jo-In » (Joint Initiative). Lancé au milieu des années 2000, ce projet entre la Clean Clothes Campaign (CCC), l’Ethical Trading Initiative (ETI), la Fair Labour Association (FLA), la Fair Wear Foundation (FWF), Social Accountability International (SA8000) et le Workers’ Rights Consortium (WRC) n’a pas conduit à une coopération plus étroite et les différents systèmes continuent de fonctionner séparément. Source: Marx A. November 2010. Global governance and the certification revolution : types, trends and challenges. Working Paper n°53.].
Malgré ces défauts, la position d’OMM est d’encourager proactivement le développement et la notoriété des standards présentés dans cette analyse. Au-delà de la question de leur impact, variable mais dans tous les cas significatif, cette approche se justifie selon OMM par le caractère extrêmement limité de l’offre actuelle en vêtements « durables » : l’étroitesse du marché fait que l’on ne peut tout simplement pas se permettre une vision trop critique ! Tant qu’un minimum de critères sont respectés, toute initiative allant dans le sens de vêtements plus durables est donc la bienvenue.
Il faut par ailleurs se rappeler que ces standards ciblent avant tout les consommateurs et leurs pratiques d’achat. Ils n’empêchent donc en rien, bien au contraire, d‘agir également aux niveaux politique et citoyen, comme le proposera OMM au travers de sa future campagne textile.