Dramatique, catastrophique, inimaginable. Les mots manquent pour qualifier les récentes inondations en Allemagne et en Belgique. Malgré les décès, les innombrables victimes et les dégâts économiques considérables, il en est encore, notamment parmi nos décideurs/euses politiques, pour mettre en doute le lien entre le dérèglement climatique et ces évènements qui se multiplient… On a envie de leur dire, de leur crier plutôt : « ça y est, nous y sommes, le changement climatique c’est maintenant ! »
Ce n’est pourtant pas faute d’avoir été alerté∙e∙s. Le climatologue J.P. van Ypersele nous le rappelait encore cet été lors de son passage à la RTBF. Il se référait au premier rapport des experts du GIEC en… 1990. Alerté∙e∙s, nous le sommes également par de nombreux pays du Sud, qui subissent aujourd’hui de manière encore plus fréquente et intense ce type d’événements, alors même qu’ils sont historiquement les moins responsables du changement climatique.
Au travers de sa campagne « Climate justice : let’s do it fair », Oxfam- Magasins du monde veut rappeler combien la crise climatique requiert davantage de justice sociale et économique. Mais s’il est un secteur où la question climatique n’a pas encore percolé, c’est bien celui du commerce : les mêmes accords de libre-échange, aux impacts sociaux et environnementaux délétères, sont encore et toujours négociés, à l’image du traité UE-Mercosur (voir www.omdm. be/letsdoitfair). Or le commerce peut être une solution, comme le démontre le commerce équitable sur le terrain depuis des décennies. Véritable outil de la transition, il donne aux communautés du Sud les moyens de s’adapter et de diminuer leurs émissions.
Nos partenaires équitables mettent quotidiennement en pratique la résilience climatique, en investissant dans l’agriculture biologique, en diversifiant leurs cultures, en lançant des projets de reforestation… C’est le cas de nos partenaires de campagne Manduvira et Cooproagro en Amérique latine (produisant respectivement sucre de canne et cacao), ACPCU en Afrique (café) ou CORR-the Jute Works, Villageworks et Y-Development en Asie (respectivement paniers en jute ou hogla, pailles en bambou et cuillères de bois) (voir infographie p.30). Au Sud comme au Nord, les organisations de commerce équitable adoptent des solutions pour diminuer leur impact sur le climat. Que ce soit en utilisant des matériaux renouvelables ou recyclés, en réduisant leurs déchets, en adaptant leurs techniques de production ou en privilégiant les énergies propres, chacun de leurs efforts compte.
Si nous ne mettons pas beaucoup d’efforts dans la question environnementale, les gens seront confrontés à l’avenir à plus de glissements de terrain, à l’érosion des sols, à des inondations… Ce sera particulièrement difficile pour les agriculteurs. Ils ne pourront pas pratiquer l’agriculture et devront déménager ailleurs pour trouver du travail. La nourriture sera moins disponible dans cette région, tant au niveau des cultures que de l’élevage (vaches, moutons, etc.).
Yorkonia Tumwijeho, responsable d’ACPCU
On le voit, le commerce équitable est un bon moyen de mettre en pratique la justice climatique. On peut lui reprocher son caractère micro-économique mais pour le généraliser à une échelle plus globale, nous aurons besoin de toujours plus de citoyen∙ne∙s engagé∙e∙s, de consommateur/ rices conscientisé∙e∙s, d’entreprises responsables et de dirigeant∙e∙s politiques à la hauteur. Pour limiter les impacts et les futures crises, toutes les forces sont et seront nécessaires. Chaque dixième de degré en moins de réchauffement global compte !
Comme le disait l’expert français Patrick Lagadec (et à l’image de la crise sanitaire actuelle), « les crises de demain sont souvent le refus des questions d’aujourd’hui ». Face à l’urgence climatique, nous devons réunir toutes nos forces, maintenant, pour diminuer les impacts à venir et faire en sorte de limiter les futures crises, au Nord comme au Sud.
Sachant que le changement climatique est aussi une formidable opportunité de repenser le système, ensemble, mettons en pratique la transition écologique et sociale et rendons-la plus équitable !
Nous devons prendre soin de notre planète, car c’est la seule que nous ayons. Et sur cette planète, nous avons assez de ressources pour nos besoins, mais pas assez si nous continuons de surconsommer. Nous devons donc être responsables de notre consommation, réfléchir à deux fois avant d’acheter un produit et l’utiliser à bon escient.
Milton Suranjit Ratna, responsable du commerce équitable chez CJW